Un attentat suicide spectaculaire a secoué hier matin la ville de Dellys, à l'extrême est de la wilaya de Boumerdès, à quelque 140 km d'Alger. L'attaque a visé la caserne des gardes-côtes, dans l'enceinte du port de la ville, faisant 34 morts et plus d'une soixante de blessés. Le bilan nous a été communiqué par des sources hospitalières hier en fin de journée, selon lesquelles parmi les blessés il y a 2 civils. Vers 11h, alors que les services de la Protection civile étaient encore à la recherche de survivants sous les décombres, sur les lieux de l'attentat, on a fait état de 30 morts et 45 blessés. Ce qui fera dire à nos interlocuteurs que les pertes risquent d'être plus importantes, surtout que parmi les blessés il se trouve des militaires grièvement atteints. Il y aurait même des cas de disparition vu que le souffle aurait projeté des corps dans la mer. « L'explosion s'est produite vers 7h45, secouant fortement nos habitations, soufflant portes, fenêtres et vitres et arrachant bon nombre d'entre nous au sommeil. Tout de suite après, un épais nuage de fumée a envahi nos maisons », nous ont déclaré les habitants de la cité Ben Badis, riverains de la caserne. Sur la route du port, les débris d'un véhicule étaient éparpillés ça et là. Ils seraient, selon toute vraisemblance, ceux du véhicule utilisé par les terroristes. « Heureusement que tous ces débris n'ont pas touché les habitants », nous dit encore un riverain de la caserne qui nous fait visiter sa maison, située à une centaine de mètres de l'endroit de l'explosion, où nous avons trouvé des murs fissurés, des portes et des fenêtres arrachées et des vitres brisées. De l'autre côté de la rue, un bâtiment a eu toute sa toiture soufflée. Les policiers qui ont vite délimité un périmètre de sécurité nous interdiront l'accès au lieu de l'attentat et tous ceux que nous avons sollicités refuseront de nous communiquer le moindre indice sur cette attaque. Le visage crispé et à bout de nerfs, ils nous ordonnent de faire demi-tour, arguant qu'ils ont reçu « des instructions » leur enjoignant de ne rien dire et de ne permettre « à personne » de s'approcher du lieu de l'attentat. Le même black-out sera imposé à l'hôpital de Dellys, où des responsables tout aussi sinon plus hermétiquement fermés à toute communication mettront le même zèle pour se rendre coupables de la rétention de l'information. Cependant, nos sources nous ont appris que le premier bilan de cette attaque était d'une vingtaine de morts et 35 blessés, tous évacués vers l'hôpital de la ville. Par la suite, le bilan n'a cessé de s'alourdir au fur et à mesure que l'on dégageait les décombres. Et la courbe qui n'a cessé de monter depuis les premières minutes de l'attentat a connu une certaine stabilité vers midi. Un moment où le ballet des ambulances évacuant morts et blessés se poursuivait toutefois. Vu le nombre important de victimes, beaucoup de militaires ont été transférés vers d'autres établissements sanitaires tels l'hôpital de Bordj Menaïel et ceux d'Alger. Avant d'arriver à l'hôpital de Dellys, nous avons vu les éléments de la Protection civile, appuyés par l'armée, en train d'enlever les décombres. Certaines indiscrétions briseront le black-out et nous apprendront que le site était composé de 16 chalets en préfabriqué, installés après le séisme de mai 2003 suite aux dégâts occasionnés aux bâtiments de la caserne, en attendant de les reconstruire. Lesquels ont été presque totalement emportés par le souffle. On nous déclare en outre que l'explosion a fait un énorme cratère. A une centaine de mètres du lieu de l'explosion, nous apercevons de nombreux véhicules calcinés. L'attaque, qui rappelle celle de Lakhdaria (ex-Palestro) du 11 juillet dernier, a été perpétrée avec un fourgon appartenant à un livreur de produits alimentaires qui approvisionnait la caserne. Celui-ci aurait été enlevé tôt dans la matinée d'hier pour être remplacé par un kamikaze au volant du véhicule. Le kamikaze a réussi à franchir le poste de garde juste après que les soldats ont fini de saluer le drapeau, a-t-on appris sur place. Bien que n'étant pas encore revendiqué, l'attentat serait perpétré par la seriet de Mizrana qui active sous la coupe de la katibat Al Ansar, dirigée depuis peu par Harek Zoheir dit Sofiane El Facila qui prend la tête de cette Katibat en remplacement de Saâdaoui promu « émir » de la zone 2 de l'ex-GSPC devenu Al Qaïda du Maghreb islamique. A rappeler qu'en été 2005, une vedette de la marine avait fait l'objet d'un attentat à la bombe dans ce même port de Dellys.