Décidément, C'est un véritable parcours du combattant pour se faire délivrer sa carte de vote. Une preuve par neuf que la bureaucratie a toujours la peau dure. Celle-là même qui nous conduit à penser que, trop souvent, elle se noie dans un verre d'eau … La citation de Gustave Le Bon qui me vient à l'esprit est on ne peut plus juste :« Beaucoup d'hommes sont doués de raison, très peu de bon sens ». Autrefois, lorsqu'un citoyen atteignait l'âge majeur de 18 ans — inscrit à l'état civil, cela va de soi —, il recevait automatiquement et illico sa carte d'électeur. Il n'avait pas à arpenter les couloirs de la « baladia », ballotté tel un ludion d'un service à un autre pour obtenir le fameux document. Mais depuis belle lurette, mon voisin de palier et moi, sans oublier celui du dessus et l'autre du dessous, nous ne recevons plus cette carte. Pourtant, nous habitons, depuis plusieurs décennies, le même îlot, le même district, nous logeons dans le même immeuble sur lequel est apposé le même numéro de rue et nous empruntons les mêmes volées de marche de la même cage d'escalier. Excepté le vote sur la Charte et la Constitution de 1976, je n'ai pas souvenir avoir été, si ma mémoire est bonne, destinataire de ma carte d'électeur, encore moins reçu un courrier m'invitant à me présenter à la commune où j'ai vu le jour pour … me réinscrire. Idem pour mon autre voisin de la bâtisse d'en face, ou encore celui qui habite la villa derrière moi, un vieil homme qui n'a pas, jusqu'à présent, emménagé. Bien que toujours en vie (excusez la lapalissade), lucides et citoyens respectables d'une République, mes voisins sont devenus, malgré eux, abstentionnistes. Bien qu'ils n'aient jamais changé de lieu de résidence ; bien qu'ils aient été enregistrés dans toutes les opérations de recensement décennal ; bien qu'ils jouissent pleinement de leurs droits civiques, sauf ceux que la bêtise a tronqués ; bien qu'ils n'aient pas encore avalé leur extrait de naissance, mes proches voisins, désabusés, mais loin d'être des objecteurs de conscience, ne voient pas l'utilité d'aller « guerroyer » dans le département d'une administration déficiente et brouillonne, qui peine à assainir son fichier électoral. Tout simplement, car la tâche de prouver leur existence dans la commune où ils sont nés et y vivent encore, ne leur incombe pas.