La conquête arabe dans les pays du Maghreb au VIe et VIIe siècles (Ier et IIe siècles de l'hégire) demeure une période obscure à cause de l'inexistence de manuscrits d'histoire élaborés en langue amazighe. C'est dans cette optique que s'est ouvert hier à la Bibliothèque nationale du Hamma (Alger) un colloque intitulé « Les Amazighs et l'Islam : quatorze siècles d'histoire » à l'initiative du Haut Commissariat à l'amazighité (HCA). Il est question « de traiter de toute la sphère dans laquelle évolue la religion musulmane au Maghreb », explique le SG du HCA. Premier à intervenir, Mohand Akli Hadadou, docteur d'Etat en linguistique. Il regrette le fait que l'Islam n'ait pas encore bénéficié des études qu'il faut dans la vie des Berbères. D'après les recherches menées, il ressort que « le Maghreb musulman a pleinement participé à la civilisation universelle », indique-t-il. L'orateur ajoute que l'Islam est devenu un élément très important dans la personnalité des Berbères. Pour sa part, le SG du Haut Conseil de la langue arabe a souligné que les habitants du Maghreb refusent le diktat, comme en témoigne leur résistance aux invasions des Vandales et des Romains. « Les Berbères ont adopté l'Islam par conviction et même contribué à sa propagation à l'extérieur de la région », témoigne-t-il. De son côté, le ministre des Affaires religieuses et des Wakfs, M. Ghlamallah, indique que la conversion des Berbères à l'Islam s'est opérée d'une manière assez rapide. Il n'a pas manqué de soulever quelques zones d'ombre : quelle était notre religion avant l'Islam ? Sommes-nous des chrétiens, des juifs ou tout simplement des païens ? Et au ministre de donner un élément de réponse : « Selon tous les colloques organisés par le ministère, nous n'avons pas trouvé de trace d'un rite spirituel dans la société berbère avant l'Islam », ajoutant que l'essentiel est de mettre en évidence le rôle important joué par les Berbères pour propager l'Islam en Europe et en Afrique. Dans ce sens, Oukil Mustapha, de l'université de Tiaret, rappelle que la conquête de l'Espagne en 711 par le Berbère Tarek Ibn Ziad était menée par une armée de 12 000 hommes dont 9000 soldats berbères. En outre, Bekhtaoui Khadidja, de l'université de Sidi Bel Abbès, affirme que les Berbères avaient des rites spécifiques à eux, bien qu'ils soient influencés par les croyances des étrangers. Selon elle, la conquête du Maghreb a butté sur une grande résistance comme celle de Kousayla et de la Kahina, mais il y avait également une cohabitation et une coexistence pacifique. Kanoune Hayate, de l'université de Sidi Bel Abbès, souligne, elle, qu'il y avait une multiplication des actions de rébellion menées par les Berbères à cause de la politique répressive menée par les walis envahisseurs. Elle relève que Okba Ibn Nafai a recouru à des méthodes violentes dans le Maghreb, ce qui avait provoqué son assassinat par Kousayla. « Okba a opté pour la stratégie militaire, contrairement à Abou Hadjer Dinar qui a préféré la cohabitation pacifique », dira-t-elle, en expliquant que Okba était un homme militaire et non politique. Il est à souligner que les travaux du colloque se poursuivront jusqu'à demain et seront clôturés par un débat de synthèse.