Alain Robbe-Grillet, qui s'est éteint (1) la semaine dernière, est l'un des plus grands romanciers du XXe siècle et le principal animateur du mouvement du Nouveau roman en France. Il a été aussi de tous les combats qui ont secoué la deuxième moitié du XXe siècle : la guerre d'Algérie (il a signé en 1957, avec les « 120 », le manifeste pour l'arrêt des hostilités et l'ouverture immédiate des négociations pour l'auto-détermination du peuple algérien), la guerre du Vietnam (il a fustigé les Etats-Unis d'Amérique, à cause de leur politique « carnassienne » au Vietnam), lors des événements de mai 1968 (il a été au côté des jeunes pour la liberté, la paix et l'amour), les guerres d'indépendances des pays du tiers-monde (il a dénoncé le colonialisme et a demandé le droit des peuples à disposer d'eux-mêmes). Plus tard, il défendra les Palestiniens et demandera à ce qu'il y ait une paix entre Arabes et Israéliens. En 1984, en pleine guerre irako-iranienne, il visitera Baghdad, non pour saluer Saddam Hussein, mais pour demander la paix ! Je me rappelle toujours de sa mémorable interview avec l'écrivain palestinien Djabra Ibrahim Djabra (publiée à Paris dans El Yaoum Essabeï. Il disait à Djabra : « Je ne peux jamais cautionner la guerre ! » Il y a quatre ans, il a été élu membre de l'Académie Française. qu'il a refusé. Sa célèbre phrase : « Je ne pourrai jamais m'asseoir à côté de mandarins qui refusent le renouveau de la langue française ! » résonne toujours dans les couloirs de la plus célèbre des institutions françaises. Beaucoup de critiques disent que la prise de conscience d'Alain Robbe-Grillet s'est faite contre l'existentialisme qui privilégiait le « message » en littérature et favorisait un certain type de discours engagé, dont on commençait, vers 1950, à mesurer le faible pouvoir d'intervention sur l'histoire (le nouveau roman a coïncidé avec la guerre d'Algérie et le retour au pouvoir du général de Gaulle). Alain Robbe-Grillet a publié 20 romans, cinq essais et un recueil de nouvelles 2 Il se peut que La Maison de rendez-vous soit son meilleur roman. Il est moins « nouveau » que les précédents, mais il est plus « étonnant ». Enfin, certains écrivains et critiques (notamment les universitaires disent que Robbe-Grillet, était sulfureux et narcissique, mais un grand écrivain et cinéaste3, pourquoi Alain Robbe-Grillet n'aurait-t-il pas le droit d'être sulfureux, (Peut-être à cause de ses positions pour les oppressés comme les Vietnamiens, les Algériens, les Palestiniens… Dans un Occident oppresseur, raciste et… colonialiste !) et narcissique (certainement parce que son érudition dépassait largement la médiocrité des « mandarins » et les pseudo-écrivains de sa génération !). (1) Alain Robbe-Grillet avait 85 ans (2) En majorité aux éditions de Minuit (3) Après R. Resnais et Godard, il faut voir ou revoir les films de Grillet