Sept ans sont passés depuis le déclenchement des événements de Kabylie en avril 2001 et le temps n'a rien entamé du souvenir des tragiques années de répression. L'oubli est presque impossible, interdit, pour notamment ces nombreux blessés qui traînent jusqu'à aujourd'hui des séquelles physiques à travers des prothèses que portent certains ou des balles encore logées dans le corps d'autres comme le cas de ce jeune habitant de Sidi Aïch. Extraire la balle qui avait touché Nassim, lors des élections législatives rejetées par les archs en 2002, est un risque qui pourrait lui coûter la vie. Elle le prend en otage depuis plus de six ans et il vit avec. Farid, lui, a perdu un œil dans les troubles qui ont marqué les élections locales de la même année. Il vit avec une prothèse tout comme Noureddine qu'une blessure en avril 2001 a amputé d'une jambe. La prothèse qui lui a été faite en Ecosse n'est plus à sa taille. Il sollicite une prise en charge pour un retour en Ecosse. Comme Nassim, Farid et Noureddine, ils sont une cinquantaine de blessés à Béjaïa à retrouver l'occasion de l'anniversaire du printemps noir, avec la même mémoire stigmatisée. Si l'Etat les a indemnisés avec une pension mensuelle, la réparation morale qu'ils ont réclamée n'est pas totalement établie. Ils l'attendaient surtout dans le jugement des auteurs des assassinats. A Béjaïa, un seul procès a eu lieu dans ce cadre, celui du policier qui avait tiré sur un jeune citoyen dans un café à Sidi Aïch, le 26 juin 2001. Il a été condamné en mars 2003 à 20 ans de réclusion criminelle. Les autres comparutions que le mouvement citoyen avait criées n'auront pas lieu, sauf celle du gendarme qui avait tiré sur Guermah Massinissa, celle-là devant une juridiction militaire. « Toutes les plaintes qui ont été déposées l'ont été contre X », constate l'ex-délégué Bezza Benmansour. La « réparation morale » est proposée à travers la dimension de « citoyenneté » reconnue par le décret présidentiel du 31 juillet 2005 qui a complété le décret du 7 avril 2002 fixant les droits des victimes des événements de Kabylie. Ces droits ont consisté en des indemnisations qui ont concerné les ayants droit des victimes décédées et les blessés. En tout, ce sont 710 blessés et 37 victimes décédées que les pouvoirs publics ont reconnu comme tels à Béjaïa. Plus précisément en tant que « victimes des événements ayant accompagné le mouvement pour le parachèvement de l'identité nationale » et de « la promotion de la citoyenneté », est-il ajouté dans le décret de 2005. 792 demandes, selon des chiffres officiels, ont été formulées pour le statut de blessés des événements du printemps noir et 40 autres pour celui de martyrs de ces événements auprès de la commission de wilaya présidée par le wali qui en a rejeté beaucoup pour absence de rapport avec le contexte des événements. A ce jour, des dossiers qui font l'objet de controverse sont pendants. Les plus importants concernent les cas de quatre victimes décédées dans le contexte du printemps noir, dont deux dans l'incendie d'un siège du FFS, mais que l'administration rejette. Ils sont en instance au même titre qu'une cinquantaine de dossiers qui ont été déposés à l'expiration des délais impartis par décret.