L'opposant algérien Mourad Dhina a critiqué jeudi à Paris le système judiciaire en Algérie où "le juge peut prendre une décision sur un coup de téléphone" du pouvoir, lors d'une conférence de presse au lendemain de sa libération après six mois de détention en France. "En Algérie les procédures judiciaires sont inexistantes puisque le juge peut prendre une décision sur un simple coup de téléphone" des dirigeants politiques, a déclaré l'opposant qui s'exprimait dans les locaux de la Ligue des Droits de l'Homme (LDH). Fondateur du mouvement Rachad (Droiture) basé en Europe et ex-cadre du Front islamique du salut (FIS, dissous), ce physicien exilé en Suisse avait été arrêté le 16 janvier à l'aéroport parisien d'Orly en vertu d'un mandat d'arrêt international. Il a été libéré mercredi après une décision de la cour d'appel de Paris de s'opposer à la demande d'extradition formulée par l'Algérie. La demande algérienne s'appuyait sur une condamnation par contumace en juin 2005 pour enrôlement dans un groupe terroriste armé actif à l'étranger. Le parquet général avait émis un avis défavorable à la demande d'extradition. Il avait relevé des discordances sur la date des faits reprochés, mais aussi des imprécisions sur les faits eux-mêmes, à savoir l'accusation d'avoir commandité ou financé l'achat d'un avion pour le compte d'un groupe terroriste. "Nous, militants des droits de l'homme, ne pouvons nous empêcher de voir" dans cette affaire "une instrumentalisation de la justice française par les autorités algériennes afin d'arrêter et persécuter un opposant algérien", a déclaré lors de la conférence de presse Rachid Mesli, avocat exilé en Suisse, membre de la direction de Rachad, emprisonné en Algérie entre 1996 et 1999. Le jour où l'Algérie fête ses 50 ans d'indépendance, Mourad Dhina a estimé que l'Algérie n'avait toujours "pas d'Etat", "puisque nous n'avons pas d'Etat de droit", a-t-il assuré. "En ce jour anniversaire on aurait aimé avoir quelques motifs de satisfaction en ce qui concerne une amélioration du respect des droits de l'homme" en Algérie, a déclaré Patrick Baudouin, président d'honneur de la Fédération internationale des ligues des droits de l'Homme (FIDH). "Malheureusement ce n'est pas le cas, au contraire cela s'aggrave dans certains domaines", a-t-il conclu.