Se nourrissant tels des prédateurs et sans aucun scrupule de la naïveté des âmes en détresse à qui le destin n'a pas souvent souri, les charlatans, dont la conscience est dépourvue du moindre principe de la morale, piègent souvent leurs victimes désemparées en miroitant que leur salut et la solution à leurs problèmes tiennent à quelques incantations et des potions fantasmagoriques, qu'eux seuls peuvent en garantir l'efficacité, bien sûr en invoquant la baraka des saints et pourquoi pas la force occulte des djinns. Bien que condamnée par la religion et prohibée par la loi, la sorcellerie est devenue de nos jours une souricière, dont les prises se comptent malheureusement parmi toutes les catégories sociales. Riche ou pauvre évidemment. M. H., une femme mariée de 48 ans et mère d'une fille, a transformé son appartement familial, situé dans un des quartiers de la ville de Bou-Ismail, en un cabinet de voyance et de sorcellerie. Cette sorcière des temps modernes, dont le niveau d'instruction et de connaissances religieuses sont très limités, a réussi à se faire un nom dans le club très fermé des charlatans locaux. Sa notoriété est bien établie à travers toute la wilaya de Tipasa et même au-delà, puisqu'elle attire ses clientes, comme par magie, viennent de toutes les régions. Sans sourciller et avec une force de manipulation inouïe, elle abreuve ses proies avec des paroles mielleuses. Elle les a même convaincues qu'elle est capable de prédire l'avenir, chasser le mauvais sort et, comble du ridicule, intercéder en leur faveur pour améliorer leur destin tumultueux. Seulement, M. H., ou celle qui s'est arrogée des attributs divins, n'a pas prédit la visite de la police à son domicile. Probablement, ce jour-là, les djinns étaient en grève ! « Suite à des informations parvenues au service de la police judiciaire de la sûreté de daïra de Bou-Ismail faisant état qu'une dame, en l'occurrence M. H., pratiquait de la sorcellerie en son domicile, nous avons procédé à une perquisition chez elle après avoir obtenu un mandat du procureur de la République », confie une source policière. Toutefois, il y a lieu de signaler que les va-et-vient incessants de ses « clientes » ont fini par agacer ses voisins qui, dès le début, ont désapprouvé ses pratiques. « La fouille effectuée dans la maison de M. H. s'est avérée fructueuse, puisqu'on l'a arrêtée en flagrant délit en train de pratiquer de la sorcellerie ou plutôt d'escroquer trois de ses clientes, à savoir A. O., une étudiante de 23 ans de Khemisti, B. H., une célibataire de Hadjout âgée de 28 ans et, enfin, H. F., une dame de 50 ans divorcée et mère de deux enfants, native de Fouka », révèle le même interlocuteur. Et d'ajouter : « Les enquêteurs ont saisi dans le domicile de M. H. une quantité de plomb, un grand réchaud, des vêtements masculins, des bouteilles d'eau de fleurs, des feuilles sur lesquelles sont inscrits des noms, des bougies, des cadenas et autres ingrédients suspects pour être utilisés dans la sorcellerie ». Après l'arrestation des quatre femmes, elles ont été présentées devant le procureur de la République près le tribunal de Koléa qui a placé M.H. sous mandat de dépôt et les trois clientes ont été destinataires de citation directe. « L'histoire de M. H. doit servir d'exemple aux autres charlatans à ces apprentis sorciers et aux citoyens tentés de les consulter », observe Ahmed de Bou-Ismail.