Mais comment se détourner et tourner le dos à un tel filon ? Au delà des convictions de militants islamistes ou de simples théologiens qui lancèrent des publications ou écrivaient sur le sujet, l'aspect commercial est patent. Il suffit de constater que da La moralité a beau reculer, l'hygiène dans les espaces publics, recommandation divine s'il en être reléguée au dernier rang des priorités, la religion intéresse voire fascine de plus en plus. Les Algériens ne font pas exception à un phénomène qui touche le monde entier. La crise de la modernité qui d'un point de vue scientifique ou éthique n'arrive pas à satisfaire les hommes quand elle ne crée pas des problèmes encore plus insolubles explique cette quête spirituelle. Ses ambitions prométhéennes ont été revues à la baisse. La religion d'une manière ou d'une autre trouve place dans nos médias. Quel journal omet d'insérer les heures de prière ou de publier des pages spéciales lors du mois de Ramadhan ? Dans la presse écrite, un contraste crève pourtant les yeux. Les pages religieuses trouvent davantage d'espace dans les journaux d'expression arabe, Même le buteur dans sa seule version arabe «El Hadef» dédié au football réserve une page pour répondre aux interrogations liées à la pratique de l'islam et au choix des pages glorieuses de l'histoire de l'islam. A la radio ou à la télévision par contre, les émissions religieuses sont présentes sur toutes les chaînes. Un théologien comme Abou Abdessalam répond en direct chaque vendredi aux auditeurs en kabyle et éclaire ceux qui nourrissent le courrier d'El Khabar. Certes, il n'existe pas de quotidien qui ne relaterait que l'actualité religieuse. Il serait par contre fastidieux de citer tous les journaux publics (Echaab, El Djoumhouria) ou privés (El Bilad, El Khabar, El Djazair News) qui répondent aux attentes des lecteurs en la matière. Cela sans compter l'aspect religieux qui ressort dans des couvertures ou des analyses liées à des événements qui relèvent de la politique. Echourouk qui par ailleurs publie en dernière page un hadith s'est fait une spécialité. Qu'il évoque le conflit palestinien, le stage de l'équipe nationale ou le phénomène des convertis les considérations religieuses surnagent au dessus de tout. A l'autre extrême, la chronique hebdomadaire d'Ahmed Halli dans le soir d'Algérie en bon adepte de Boileau se gausse des tartufferies.Il a toujours existé une presse de sensibilité religieuse dans notre pays. Il suffit de citer les titres de l'Association des oulémas lancés dans les années 30 à l'image d'El Bassair. Il parait tous les quinze jours. Jusqu' aux années 80, le phénomène est resté marginal. Mais comment se détourner et tourner le dos à un tel filon ? Au delà des convictions de militants islamistes ou de simples théologiens qui lancèrent des publications ou écrivaient sur le sujet, l'aspect commercial est patent. Il suffit de constater que dans la même publication ou de vénérables imams recommandent la chasteté et les vertus du puritanisme, les frasques des chanteuses et actrices sont rapportées avec détails et photos affriolantes. Des siècles durant, l'Algérie et le Maghreb en général restèrent à l'abri des souffles d'autres doctrines plus rigoristes en tout cas différentes du rite malékite pratiqué par la majorité. C'est ce socle que les fetwas, puisées dans d'autres contextes socio culturels dont l'effet est amplifié par les chaînes satellitaires arabes et les conflits de nature politique, ébranlent désormais. Il y a quelques années, Harbi intitulait un de ses livres, «L'Algérie et son destin, citoyens ou croyants». L'interrogation n' a visiblement pas encore trouvé de réponse.