A J-2, éleveurs patentés, maquignons, intermédiaires et affairistes de tous poils ont de quoi se réjouir. La frénésie et la fièvre qui se sont emparées des citoyens du Vieux Rocher ont été pour eux le meilleur tremplin pour élever les prix du mouton en fonction du principe sacro saint de l'offre et de la demande, sachant que la première est nettement en décalage par rapport à la seconde. D'où le diktat imposé à la foule impressionnante qui envahit chaque jour les marchés disséminés à travers la ville de Constantine. Le spectacle est, dans tous les cas de figure, symptomatique de la mentalité des chefs de famille. Certains recherchent la bête dont le prix correspond au budget alloué à l'achat du mouton. D'autres ont pour seul fantasme de trouver le bélier qui fera impression dans le quartier, quitte à se serrer la ceinture durant plusieurs mois ou à s'endetter jusqu'au cou pour le reste de cette année 2006. Mais tous auront été les otages de cette chaîne bien huilée constituée aussi bien de professionnels de la filière que d'opportunistes qui n'hésitent pas à transformer le garage de la demeure familiale ou à louer un espace le temps d'écouler des bêtes achetées généralement directement auprès des éleveurs de la région. Certains nous ont affirmé qu'ils avaient fait le déplacement jusqu'à M'sila et bien plus loin vers le Sud à la découverte du bon filon synonyme de gros bénéfices. Bien que la concurrence soit rude avec la prédominance sur nos marchés de maquignons rompus à cet exercice, les businessmen d'occasion tirent tout autant leur épingle du jeu. Il leur suffit de s'aligner sur les cours du marché pour écouler jusqu'au dernier mouton. La stratégie de vente diffère selon des critères propres au marché des ovins. Ceux qui se prétendent éleveurs jouent habilement sur l'origine de leurs bêtes qui s'aliment bio, aiment-ils à dire, et sur des parcours de pâturage riches en plantes aromatiques qui leur donnent un goût inégalable. Il y a également ceux qui jurent par tous les saints que 50% de l'alimentation de leur bétail se composent d'orge, un aliment qui s'écoule au marché noir au prix de 2000 DA le quintal. Sûrs de la qualité de leur troupeau, il y a aussi ceux qui ne font pas trop de commentaires et encore moins de marchandage. Au mieux, ils vous diront : « C'est à prendre ou à laisser ! » Pourtant, ça marche. Leurs bêtes s'arrachent comme des petits pains avec une fourchette des prix oscillant généralement entre 15 000 DA et 30 000 DA. Quant au prix des béliers de parade, la rumeur prétend qu'au marché du quartier populeux de Oued El Had, certains ont été vendus à 35 000 DA, voire plus pour ceux qui seraient voués à l'arène ou à la simple frime. Le bélier bien nanti est au goût du jour et ce n'est pas les maquignons qui s'en plaindront. Par ailleurs, loin de la frénésie des marchés d'ovins à ciel ouvert, il existe des points de vente fréquentés par des initiés. Ce sont généralement de petits élevages où l'ambiance est plus feutrée et plus conviviale. Les prix proposés ne différent pas tellement des tarifs en cours sur les places publiques, mais la confiance qui lie le vendeur et l'acheteur semble être le critère qui fidélise une clientèle qui a eu rarement l'occasion de se plaindre de la qualité des bêtes achetées avec les conseils avisés et bienveillants du maître de céans. D'autres facteurs jouent également en faveur de ces points de vente. Les conventions signées avec des organismes privés ou étatiques. C'est le cas, entre autres exemples, d'une petite unité familiale située en contrebas de la gare routière Ouest et qui a engrangé ce processus bien rodé qui semble satisfaire aux exigences des œuvres sociales de l'APC, de la jeunesse et des sports et des travaux publics, pour ne citer que ces organismes.