Des écrivains, sociologues et autres universitaires ont tenté, samedi au forum des « Mille et une news », de passer en revue la relation « complexe » entre l'intellectuel et le pouvoir. Relation souvent sujette à polémique et suscitant à la fois curiosité et intérêt des observateurs d'horizons divers. Les animateurs du débat ont été unanimes à admettre que la relation entre les deux sujets en Algérie demeure, à l'instar des autres nations en voie de développement, tendue. Hamid Grine, ancien journaliste et auteur de nombreux ouvrages, soutient qu'il existe encore des intellectuels en Algérie, contrairement à ceux qui pensent le contraire. La spécificité de l'intellectuel algérien réside, indique M. Grine, dans ses prises de position par rapport aux causes justes. Mais l'écrivain précise aussi que l'intellectuel « iconoclaste » n'existe pas en Algérie. Pour lui, le pouvoir algérien entretient une relation de méfiance à l'égard de l'intelligentsia et que celle-ci se trouve généralement marginalisée. Il cite, pour appuyer ses dires, des noms des élites algériennes restées à l'écart durant tout leur parcours pour la simple raison qu'ils n'épousaient pas la ligne dictée à l'image de Kateb Yacine, Mohammed Dib et Mouloud Mammeri. « Celui qui sort de la pensée unique est un suspect », a résumé l'écrivain. L'universitaire Noureddine Djaber, enseignant de philosophie, renvoie l'assistance à chercher la définition propre du concept du pouvoir pour pouvoir établir la relation existante, a-t-il dit. Dans le même esprit de rejet, il constate que les événements du 11 septembre ont relancé chez les pouvoirs arabes le principe de « celui qui n'est pas avec moi est contre moi ». Il ajoute à ce propos que « le caractère autoritaire demeure de mise chez les dirigeants arabes ». Pour lui, la politique du défunt président Houari Boumediene, visant la construction d'« un Etat qui ne disparait pas avec la disparition des hommes » reste sur chantier car, « 50 ans après l'indépendance on n'y est pas encore arrivé », observe-t-il. Noureddine Djaber, qui regrette la récupération d'une certaine catégorie d'intellectuels ». Abdelmadjid Merdaci, sociologue et historien, de l'université Mentouri de Constantine, admet que la violence du système est héritée de la crise de l'été 1962 et que les institutions de l'Etat ne sont pas compatibles avec la réalité. « La violence politique de l'époque n'était pas favorable à la constitution d'un groupe d'intellectuels autonome, ce qui a entraîné une rupture dans la transmission d'héritage », précise-t-il. Dans ses explications, il fera remarquer que les conséquences de la crise, née au lendemain de l'indépendance, ont atteint leur paroxysme dans les années 1970, avec un niet catégorique de tout ce qui est opposé au système. A présent, M. Merdaci s'est réjoui d'avoir constaté des intellectuels qui expriment librement leur opinion dans la presse. « Nous portons toujours sur notre dos le message de la liberté ».