A la faveur de la crise malienne aux retombées désastreuses, l'avancée du duo d'enfer, Mujao et Ansar Eddine, procédant à l'éviction de l'indésirable allié touareg des trois grandes régions administratives de Tombouctou, Gao et Kidal, se présente aux portes de Bamako. Arrachée des mains des groupes de défense de Ganda Koy et Ganda Izo, démantelés et désarmés, la ville de Douentza organise le face-à-face inéluctable entre le Sud, de la légitimité républicaine, et le Nord, de l'islamisation. C'est en terrain conquis aux deux tiers que les nouveaux maîtres du Mali entendent imposer le projet obscurantiste rejeté par les populations locales, livrées aux pires sévices : la lapidation à mort d'un couple accusé d'avoir des enfants hors mariage, l'amputation de la main à un voleur, à Ansango, des personnes frappées, à Tombouctou et à Gao, de 100 coups de fouet pour avoir eu des relations extra-conjugales ou pour avoir fumé ou bu de l'alcool. La dérive obscurantiste a connu son paroxysme avec la destruction des mausolées et des monuments, déclarés patrimoine universel. Elle risque de s'étendre au centre du Mali. C'est que la nouvelle conquête d'Aqmi, Douentza, est à seulement 120 kilomètres du poste avancé de l'armée malienne, basée à Konna. Dans ce face-à-face inéluctable, la question lancinante de la riposte à une éventuelle avancée des groupes terroristes vers le Sud reste posée. Bamako prête à la bataille décisive ? La résistance se légitime par le refus de l'occupation du Nord et la volonté de redonner espoir aux populations livrées aux brimades et aux sévices des groupes extrémistes. Dans un sursaut de dignité, l'armée se prépare nécessairement à l'assaut final. C'est précisément à Mopti qu'elle entend se redéployer pour « renforcer la ligne de front ». A une dizaine de kilomètres de là, un poste de commandement opérationnel a été installé dans la région de Savaré et confié au colonel Didier Dacko à la réputation bien établie, et décidé à laver l'affront d'une occupation humiliante. Un défi partagé par les Maliens pour en finir avec le cauchemar venu du Nord. « Nos hommes ont besoin de laver l'affront. Ils ont été obligés de reculer face à l'avancée des rebelles touaregs et des islamistes. Les populations n'ont pas été oubliées. Il appartient, aujourd'hui, à nos troupes de relever le défi », estime un directeur d'école de Mopti. Entre le Nord et le Sud, la ligne de fracture commande le combat de la survie pour la défense et la sauvegarde de l'identité malienne et son idéal démocratique menacé d'effondrement.