Neuf wilayas sont présentes à cette édition avec seize pièces théâtrales. Issues en grande partie de régions berbérophones, les troupes participantes mettent en avant la richesse de notre culture dans toute sa diversité. Incontestablement, la deuxième journée a été marquée par la bonne prestation de la troupe du théâtre régional Kateb Yacine de Tizi-Ouzou. Celle-ci a joué la pièce « Azal n Tleli » ou « Le prix de la liberté », qu'elle avait déjà présentée dans une vingtaine de wilaya du pays. La pièce en question est une véritable plongée dans la guerre de libération nationale, soutenue par des flash-back rappelant les massacres commis contre le peuple algérien, lors des évènements tragiques du 8 mai 1945. C'est l'histoire de ce vieux couple qui vit dans l'indigence. Il préfère se nourrir de glands que de plier devant le bureau du service de l'administration spéciale pour quémander — à quel prix — un kilogramme d'orge. Le vieux est un responsable militaire. Il participe au combat libérateur à l'insu de sa femme. Une nuit, alors qu'il discute avec sa femme, des combattants frappent à sa porte. Il ouvre. Deux hommes s'introduisent dans la maison, tenant un troisième gravement blessé à l'issue d'un accrochage avec une troupe militaire française. Alors qu'aidé de sa femme il prodigue soins et attention au moudjahid blessé, son voisin, à la solde des Français, frappe à la porte. Il lui demande « d'ouvrir la porte, parce qu'il a vu trois hommes y entrer. Quelques instants après, des soldats français pénètrent dans la maison qu'ils fouillent de fond en comble. Un soldat découvre un foulard imbibé de sang. L'homme qui a vendu les siens tente vainement d'obtenir du vieux une quelconque information. Ce dernier lui crie à la figure : « plutôt être brisé que se plier ». Le capitaine le tue à bout pourtant. La femme du chahid, inconsolable, venge son mari en poignardant le traître devant sa propre épouse. « Le prix de la liberté » est une mise en scène de la politique et des pratiques coloniales. Elle est aussi, et surtout, une démonstration du courage et de la bravoure du peuple algérien qui sans logistique a bravé l'une des plus grandes forces militaires d'alors pour se soustraire au harnais colonial. Koceila Mekasam, membre de la troupe en question, a souligné à l'issue de la représentation : « Nous voulons montrer au public le vrai visage de la France coloniale, mais aussi la détermination du peuple algérien à se libérer ». En outre, il a rappelé que la même troupe a joué dans une vingtaine de wilayas cette pièce écrite par Youcef Derani et mise en scène par Lyes Mokrab. Le public, subjugué tant par la thématique choisie, qui coïncide avec le cinquantième anniversaire de l'indépendance que par le jeu des comédiens, a, lui, longuement ovationné la troupe. « En plus de la beauté et de la poéticité du texte, de la qualité de la mise en scène, on a l'impression que les comédiens ne jouent pas mais vivent plutôt dans la peau du personnage, parce qu'ils jouent admirablement bien leurs rôles respectifs », a-t-on affirmé. De son côté, la jeune troupe coopérative des arts de Touggourt, qui a présenté « Yela targit » ou « C'était un rêve », a fait sensation. La pièce met en scène un jeune qui veut coûte que coûte quitter son pays après avoir obtenu son bac. Son père qui ne veut pas de cette mésaventure se rue sur son enfant jusqu'à le paralyser complètement. Le père, pour la guérison de son fils, sollicite vainement un médecin et un voyant. En vain. Un taleb lui recommande de prier le Tout-Puissant, seul à pouvoir guérir. « Yela targit » est une remarquable pièce qui pèche toutefois par l'absence de la scénographie.