S'appuyant sur un documentaire qui sera diffusé le 23 mai sur la chaîne française France 3, l'hebdomadaire a consacré sa rubrique « Evènement » à cette tragédie d'il y a dix-sept ans, sous le titre « La vérité sur l'assassinat des moines de Tibhirine », signé par Martine Gozlan qui considère que cette vérité est « une vieille bataille, un autre maquis ». Marianne rappelle alors que les terroristes du GIA ont pourtant revendiqué le crime dans le communiqué 44 de leur bulletin « Al Ansar », mais que « néanmoins, pour dédouaner l'islamisme de sa barbarie, certains ont imputé l'assassinat à une bavure de l'armée algérienne ou à une machination des services secrets ». « C'est dans les journaux, voire devant les tribunaux qu'on s'est affronté. Marianne aussi s'est retrouvé dans les prétoires pour rappeler les faits, les forfaits, la sauvagerie du GIA », soutient l'hebdomadaire qui « ne doute pas » que, cette fois encore, « dix-sept ans après les meurtres, la polémique va faire rage » et que « cette fois plus que jamais, l'idéologie à celle qui décrète coupable par nature l'armée et le pouvoir algériens qui voudra ferrailler contre la force et la vérité du témoignage ». Mariann,e qui a suivi étape par étape la réalisation de ce document filmé, qualifié d'« exceptionnel », affirme qu'il a fallu des années de patience, de rigueur mais aussi de passion pour les réalisateurs Malik Aït Aoudia et Séverine Labat pour retrouver les témoins directs dans cette affaire, qui a fait couler un fleuve d'encre et apporter des preuves irréfutables sur l'implication des terroristes du GIA dans l'assassinat des moines de Tibhirine. L'hebdomadaire publie ainsi des extraits de témoignages saisissants de ces terroristes, dont celui de Hassan Hattab, ancien membre du GIA et fondateur du Groupe salafiste pour la prédication et le combat (GSPC) qui affirme que Djamel Zitouni, son rival parmi la chefferie du maquis terroriste, l'a appelé pour lui dire : « Je t'informe que j'ai tué les moines ce matin ». Il rapporte également les aveux d'Abou Imen, dernier geôlier des moines assassinés, qui a assisté à leur décapitation et qui dit, sans état d'âme, « on n'a pas tiré une seule balle. Ils ont tous été égorgés au couteau. L'un d'eux (terroriste) m'a dit ‘'Tiens, égorges !''. J'étais pétrifié. Il m'a poussé et l'a égorgé ». Abou Mohamed, émir du GIA, affirme quant à lui que « Zitouni a pris la décision de se débarrasser des moines. Il n'était pas facile de prendre leur corps en entier, alors, ils les ont décapités », ajoutant, qu'« ils ont enterré les corps dans les montagnes de Bougara. Et moi, j'ai emmené les têtes dans une voiture pour les jeter sur la route ». L'hebdomadaire révèle également que l'enlèvement des moines devait permettre au GIA, qui réclamait en échange, la libération de Abdelhak Layada, de se faire reconnaître comme interlocuteur par la France, estimant que « ce que prouve ce film, c'est que l'égo des politiques français, les imbroglios et les rivalités au cœur de l'ambassade de France à Alger ont joué leur rôle dans ce drame ». Les sept moines français de Tibhirine avaient refusé de quitter le monastère de Notre-Dame-de-l'Atlas, malgré les menaces du GIA qui promettait de tuer tout étranger non musulman resté sur le sol algérien. Ils restaient fidèles aux villageois, au monastère et à la coopérative agricole qu'ils avaient créée. Cité par Marianne, le réalisateur et journaliste algérien Malik Aït Aoudia, correspondant de l'hebdomadaire en Algérie et co-auteur du film, a déclaré avoir voulu « rendre hommage à ces hommes qui aimaient mon pays et ne l'avaient pas abandonné malgré le fleuve de sang et la solitude ». « Ma part à moi, c'est de faire toute la vérité sur leur martyr », a résumé ce journaliste qui est déjà aussi l'auteur, avec Séverine Labat, du documentaire « Autopsie d'une tragédie », sorti en 2003.