Les intérieurs des maisons prennent l'allure de salons de beauté pour donner libre cours à la forme la plus expressive du tatouage désormais de plus en plus décrié. Pourtant dans la mémoire collective réside la silhouette de Hizia l'enivrante princesse des Ouled Naïl dont le tatouage faisait parler d'elle. Aujourd'hui, cet art renaît de ses cendres. Passé pour être une forme d'expression profane à caractère totémique, certains se «piquaient» à profusion par coquetterie, ou encore pour affirmer son appartenance tribale. Dans le fief des Ouled Naïl, le tatouage avait ses règles dans la manière d'embellir une partie du visage ou des bras. Chez la femme, c'était tout simplement un maquillage scellé à vie sur une partie du corps. Sur le plan culturel il devint aussi un signe de révolte contre la société dans lequel vit l'individu. La marginalisation, la délinquance sont arrivées par à-coup transformer le tatouage en lecture de mutilation du corps. A travers les âges, le tatouage a traversé toutes les civilisations pour s'imposer comme une marque indélébile de l'identité. Les tatoueurs sont même passés pour devenir guérisseurs en piquant afin de prévenir le goître parait-il. Le manque d'iode aidant dans l'arrière pays, la saignée pratiquée devenait ainsi maîtresse de vertus dans le tatouage. Au-delà de ces considérations thérapeutiques, le travail artistique du tatoueur fait foi d'une grande maîtrise dans le choix des motifs. L'attirail du tatoueur se résumait dans un éphémère outillage : Un aiguillon, l'huile de cade, de la cendre, et un aseptisant. Cette petite chirurgie «plastique», avait dans le passé drainé des foules entières. Mustapha Benbrahim le barde du «Melhoun» eut l'idée de créer l'une des plus belles proses à l'adresse de la mariée : «Ô ! Tatoueur, soit prudent avec elle, prend la peine de la piquer avec doigté pour la rendre encore plus belle…». Cette petite sérénade vouée à cet événement nuptial nous transpose dans la romance du bon vieux temps.