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Sommes-nous otages des algorithmes ?
Technologies de programmation de données
Publié dans Horizons le 28 - 08 - 2013


C'est une récente conférence de Kevin Slavin, entrepreneur et professeur de MIT Media Lab sur le thème : « La manière dont les algorithmes déterminent le monde contemporain », largement commentée sur de nombreux sites et blogs, qui remet au goût du jour la question de l'omniprésence des algorithmes dans notre vie quotidienne, de leur influence, une question à laquelle scientifiques, sociologues et philosophes tentent de trouver un cadre de référence. Il faut longuement chercher pour trouver un secteur d'activité de la vie quotidienne qui puisse échapper à cette « suite finie et non-ambiguë d'opérations ou d'instructions permettant de résoudre un problème », pour reprendre les termes de l'encyclopédie en ligne Wikipedia définissant l'algorithme, ce « nom latinisé du mathématicien perse Al-Khawarizmi, surnommé le père de l'algèbre », précise l'encyclopédie. Sans nul doute que les algorithmes du moteur de recherche de Google sont ceux dont on connaît le plus les effets. Les « suites finies et non-ambiguës d'opérations » de Google sont au cœur du fonctionnement pour bon nombre d'entreprises présentes sur le web qui dépend de la disponibilité des données fournies par le moteur de recherche. Celui-ci, grâce à son puissant algorithme secret, « répertorie, classe et référence avec pertinence et efficacité des milliards de pages Internet en fonction de dizaines de milliers de paramètres » souligne le site www.ve-studio.net dont les animateurs reconnaissent au moins à Google d'avoir cité et référencé leur site, et donc d'en avoir facilité la citation au sein de cet article. Toujours actualisé et mis à jour, l'algorithme de recherche de Google « conditionne la visibilité de millions de sites Internet et de par là même leur audience et donc une bonne partie des sources de revenus directes ou indirectes des entreprises présentes sur la toile. Il n'est pas farfelu de dire, qu'aujourd'hui, l'algorithme de Google est un acteur mondial majeur et incontournable sur lequel repose des pans entiers de notre système économique actuel », poursuit cette source. Le site de l'hebdomadaire français www.lepoint.fr s'est intéressé, dans un dossier spécial mis en ligne en novembre dernier, au fonctionnement de « cette fabuleuse machine à référencer », avec comme problématique de base de savoir si « les résultats affichés par Google ne sont que le fruit d'un algorithme ». S'appuyant alors sur un article du site britannique spécialisé dans les nouvelles technologies The Register, l'hebdomadaire a tenté de jeter la lumière sur ces ingénieurs « chargés, chez Google, de compléter ou d'ajuster les résultats du travail du fameux algorithme ». The Register a traité des algorithmes de Google sur la base d'un document qu'il s'est procuré et qui « pourrait bien être celui de ces « juges », qui décident quelle amélioration de l'algorithme sera mise en ligne ou pas. Chaque année, Google apporte plus de cinq cents modifications sur son très cher code, soit une à deux par jour : de quoi faire de nombreux essais ! », lit-on sur le site du journal Le Point, pour qui cet « algorithme de Google est probablement l'un des secrets les mieux gardés au monde. Tous les sites internet essaient de faire « remonter » leur identité dans les pages de résultats, parfois au prix de très onéreux développements via des sociétés de conseil, spécialisées dans le référencement. » La puissance et l'impact des algorithmes de Google se sonten tout cas vérifiés lors d'une mise à jour majeure de PageRank, nommée Panda. « Le PageRank ou PR est, selon Wikipedia, l'algorithme d'analyse des liens concourant au système de classement des pages Web utilisé par le moteur de recherche Google. Il mesure quantitativement la popularité d'une page web. Le PageRank n'est qu'un indicateur parmi d'autres dans l'algorithme qui permet de classer les pages du Web dans les résultats de recherche de Google. Ce système a été inventé par Larry Page, cofondateur de Google et est une marque déposée. » Google a du coup suscité des vagues de remous en reléguant des sites en bas de page, divisant ainsi leur nombre de visiteurs et donc leurs revenus. Les inquiétudes se sont un peu plus prononcées depuis, car selon l'avis de beaucoup d'observateurs, collecté par le site de l'hebdomadaire français, « en jugeant de la qualité des contenus, Google s'arroge un pouvoir qu'il n'est pas bon de confier à une entreprise privée, dépendante exclusivement de ses revenus publicitaires. » Beaucoup se sont mis à douter « que PageRank ne soit pas seul aux commandes », considérant qu'il « reste à savoir dans quelle mesure l'humain intervient », amis tous ou presque s'accordent à dire, comme l'écrit le site français que « Google ne le dira jamais, car il se réfugie très souvent derrière le caractère automatique des résultats de recherche. Cela lui permet de ne pas être tenu (trop) responsable par les autorités si un site néonazi ou pédophile apparaît en haut de page. Idem lorsque des entreprises ou des personnalités voient leur page officielle apparaître plus bas que des sites parodiques. » Autre domaine de prédilection du règne des algorithmes, les places financières avec leurs transactions nombreuses et répétitives. « Il faut savoir qu'aux Etats-Unis, à l'heure actuelle, plus de la moitié des ordres de transaction en bourse sont passés par des programmes car ils permettent d'engranger des millions de dollars en gagnant quelques précieuses millisecondes (jusqu'à 50 millions de dollars pour 0,001 seconde) », expliquent les auteurs de l'article du site www.ve-studio.net pour justifier « une utilisation massive de ces programmes et un recrutement d'informaticiens croissant qui va de pair en plus d'importants et onéreux investissements dans des structures informatiques techniques. » Et de rappeler « le blocage des serveurs du Nasdaq lors l'introduction en Bourse de Facebook suite à un volume d'ordres d'achats et de ventes beaucoup trop important qui n'a su être géré, à généré plusieurs centaines de millions de dollars de pertes chez certains investisseurs » qui aujourd'hui sont derrière une action collective en justice. La prééminence des calculs algorithmiques sur nos fonctions quotidiennes a tellement évolué et pris une place si déterminante dans la vie humaine, que des sociologues ont en fait un sujet de dissertation. Ainsi, le sociologue Tarleton Gillespie, professeur dans une université américaine nous donne-t-il son analyse sociologique du phénomène des algorithmes dans un article repris par le site www.internetactu.net : « Les algorithmes jouent un rôle de plus en plus important dans le choix de l'information que nous considérons comme la plus pertinente pour nous, dit il ajoutant qu'ils constituent « un élément crucial de notre participation à la vie publique. Les moteurs de recherche nous aident à naviguer dans des bases de données massives d'information ou sur l'ensemble du web. Les algorithmes de recommandation cartographient nos préférences. Les algorithmes gèrent nos interactions sur les réseaux sociaux, soulignant les nouvelles d'un ami tout en excluant celles d'un autre. Les algorithmes conçus pour calculer ce qui est « chaud », « tendance » ou « le plus discuté » écrèment les bavardages sans limites. » En plus d'aider à la recherche de l'information, ils constituent aux yeux du sociologue « un moyen de savoir ce qu'il y a à savoir et comment vous le savez, de participer au débat social et politique et de se familiariser avec les publics avec lesquels nous discutons. » A propos du débat sur la notion de neutralité des algorithmes, Gillespie voit que pas un « service d'information ne peut complètement livrer une information sans intervention. Si un algorithme peut évaluer qu'un site est le plus pertinent pour votre requête, ce résultat n'apparaitra pas si c'est un site de dissident politique en Chine ou si c'est un site nazi en France. » Le sociologue américain souligne enfin que « les fournisseurs d'algorithmes insistent sur l'automatisme de leurs produits, comme si l'automatisme était le fondement de leur légitimité. »

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