Devant le statu quo qui plombe la transition politique, le pays sombre dans la violence. 13 personnes ont été tuées et huit autres blessés, dans la nuit de samedi à dimanche, après une attaque suicide à la voiture piégée contre un poste de sécurité à 50 km de Benghazi (Est). Les autorités, qui ont décrété un deuil de trois jours, déplorent « cet acte de traîtrise » qui « intervient au moment où l'armée libyenne, en particulier les forces spéciales Saiqa (une unité de l'armée libyenne chargée de sécuriser Benghazi, ndlr) déploient des efforts pour instaurer la sécurité (...) notamment dans la ville de Benghazi ». Appelant à l'unité face à de tels actes, elles s'engagent à poursuivre leurs efforts pour la formation d'une armée et d'une police. Connue pour être le fief de miliciens qui y règnent presque en maîtres, la capitale de l'Est, Benghazi, est, ces derniers jours, le théâtre d'une série d'attaques et d'assassinats visant des militaires, des policiers, des juges, des notables et responsables de médias. Plus de 300 personnes y ont fait les frais, témoignant de l'impuissance des autorités à mettre hors d'état de nuire leurs auteurs. Le chef des services de renseignement militaires de Benghazi a été tué vendredi lors d'une visite chez des proches à Derna. Jeudi, un homme a été tué dans l'explosion de sa voiture à Tobrouk, le premier assassinat du genre dans cette ville de l'extrême Est de la Libye. La violence menace les élections et bloque les sites pétroliers Aussi grave que la détérioration sécuritaire, l'impasse politique est toujours de mise. Dans ce climat de terreur, la Libye attend toujours sa nouvelle Assemblée constituante. L'élection devait avoir lieu demain mais devant le manque d'intérêt des électeurs et le faible taux d'inscription sur les listes de vote, la Haute commission nationale pour l'élection a déjà repoussé à deux reprises la fin de la période d'enregistrement. Personne ne sait quand l'élection aura lieu. Mais la date n'est pas ce qui inquiète le plus le président de la Commission électorale, Nouri Al Abbar, pour qui le principal défi de cette élection reste la sécurité. Les centres d'enregistrement et de vote, pour la plupart dans des écoles, ont été l'objet de menaces, en particulier dans trois villes : Benghazi et Derna à l'Est, et Syrte dans le Centre. « Il y a deux semaines, les bureaux de Syrte ont été attaqués (...) A Benghazi, quelques centres ont été visés par des explosions et aussi dans la ville de Derna. Le ministère de l'Education a peur d'ouvrir les centres dans des villes comme Derna. Il n'y a pas de forces gouvernementales qui puissent protéger les élections », a-t-il souligné. Les raisons ? Certains groupes extrémistes rejettent les élections qui, selon eux, ne sont pas conformes à la loi islamique. La Commission électorale a donc décidé de s'allier aux autorités religieuses dans l'espoir d'élaborer une fetwa démontrant de l'importance du scrutin. « Avec le ministère des Affaires religieuses, nous essayons d'utiliser le discours religieux pour encourager les gens à participer aux élections », a-t-il souligné. Sur le plan économique, le drame n'est pas moindre. Le ministre libyen du Pétrole, Abdelbari Al Aroussi, a évoqué de nouveau, samedi, un possible recours à la force pour lever le blocage des terminaux pétroliers dans l'Est de la Libye, imposé depuis juillet par des gardes autonomistes. Selon lui, le blocage des terminaux a provoqué une chute de la production à 250.000 barils/jour, contre près de 1,5 million b/j avant le début de ce mouvement de protestation.