C'est sans grande surprise que, en cet été de canicule, un sondage vient nous indiquer que les Britanniques accordent plus de crédit à l'information puisée dans l'encyclopédie en ligne Wikipedia qu'à celle diffusée par la très prestigieuse BBC. C'est un institut du nom de TouGov qui a interrogé près de 2.000 personnes pour conclure, selon le site liberation.fr, que « 64 % font confiance aux auteurs de Wikipedia en ce qui concerne la véracité de leurs écrits. L'encyclopédie en ligne devance ainsi les journalistes de la BBC, qui recueillent un taux de confiance de 61 %. Ce chiffre descend à 45 % pour la presse quotidienne dite sérieuse - comme le Times ou le Guardian - et à 13 % pour les tabloïds tel le Sun » Le site précise, néanmoins, que Wikipedia arrive derrière « l'Encyclopaedia Britannica à qui 83 % des Britanniques font confiance en termes de fiabilité. » Beaucoup de chemin parcouru depuis la première aventure lancée par un jeune entrepreneur américain, en janvier 2001. Jimmy Wales, surnommé Jimbo Wales, jeune entrepreneur américain qui a fait fortune dans la manipulation des opérations de Bourses au profit de Chicago Options Associates qui l'emploie comme directeur des opérations, a eu l'idée de cette encyclopédie collaborative après avoir tenté, en 1996, une drôle d'expérience de moteur de recherche, nommé « Bomis » dédié à la vente de photos érotiques. Le succès de Wikipedia est immédiat obligeant son fondateur à constituer, en 2003, la Wikimedia foundation, à but non lucratif, pour soutenir le développement du projet. Depuis, l'aventure a bien tourné et « Wikipedia compte aujourd'hui près de 20 millions d'articles, dans 270 langues différentes et près de 500 millions de visiteurs par mois » selon le site www.economiematin.fr, qui place l'encyclopédie au rang de « sixième site le plus visité au monde ». Même si son fondateur n'en a pas tiré fortune, la sienne étant, selon ce même site, estimée à environ 1 million de dollars, il continue de lui maintenir ce cachet d'entreprise à but non lucratif, se contentant, pour sa part, d'assurer la plupart de ses revenus des conférences qu'il anime en sa qualité de président de la fondation Wikimedia, et de faire appel à des dons de bénévoles pour le financement de l'encyclopédie. « En 2012, l'encyclopédie en ligne avait récolté, en seulement deux mois, 20 millions de dollars (cinq fois plus qu'en 2008) », peut-on lire sur économiematin.fr. Pour autant, l'entreprise de Wales fait face à une série de défis, les uns communs aux business du monde de l'internet, d'autres spécifique au fonctionnement et à l'organisation de l'encyclopédie. Le scandale du programme d'écoute des communications électroniques qui a touché les géants de l'internet ne semble pas avoir épargné Wikipedia dont le nom a été maintes fois cité, l'obligeant à adopter de nouvelles mesures techniques pour sécuriser ses échanges électroniques. Ce serait une diapositive de l'agence du renseignement américain, la NSA, divulguée dans le lot des documents par l'ancien agent Edward Snowden qui aurait mis la puce à l'oreille des contributeurs de Wikipedia, qui, non contents, ont, selon numerama.com « recommandé aux internautes fréquentant les projets de la fondation d'utiliser l'extension HTTPS Everywhere (disponible sur pour Firefox et Google Chrome) conçue par l'EFF ou de faire passer leur connexion dans le réseau TOR afin de bloquer les regards indiscrets ». Depuis, Wikipedia s'est lancée dans une série de mesures techniques, détaillées sur le site de numerama.com, notamment, « l'activation par défaut de la connexion HTTPS », ou encore le système de la « confidentialité persistante » sans parvenir à assurer un seuil infranchissable de sécurisation des échanges entre ses différents contributeurs. Les systèmes de protection de l'encyclopédie, passés en revue par l'association américaine de protection des droits sur internet, l'EFF (Electronic Frontier Foundation), n'assurent pas une totale sécurité, avec notamment des failles dues au fait, selon l'EFF, citée par numerama.com, que « les pages chiffrées peuvent être soumises à l'analyse du trafic. Un adversaire suffisamment actif et fort pourrait garder une trace de la taille de chaque article et requête, et par exemple faire des déductions sur le trafic intercepté en se basant sur ces informations ». Pour autant, le journaliste du site de numerama conclut qu'à l'instar de tout système de sécurité, toujours quelque part faillible, celui de Wikipedia a « au moins le mérite d'élever fortement le niveau général de protection des utilisateurs. De fait, cela rend l'espionnage de masse plus compliqué et plus coûteux. Un assaillant devra déployer des moyens plus conséquents pour parvenir à ses fins ou alors il devra renoncer à fliquer tout le monde, en se recentrant sur les vraies menaces. » En plus des contraintes liées à la sécurisation des communications, dont l'importance a été mise en exergue depuis les révélations de juin 2013 sur les pratiques des renseignements américains avec les grands groupes de l'internet, Wikipedia est également sujet à une nouvelle difficulté, imposée par le développement des technologies et terminaux mobiles. Conçue pour fonctionner sur PC l'application Wikipedia a mis du temps à réaliser la nécessité d'entamer le virage du mobile, accusant du coup un retard important, puisque comme le rapporte le quotidien français lefigaro.fr, entre juin 2013 et juin 2014, « le nombre de visiteurs PC de Wikipedia a baissé de 14%, toutes langues confondues. A l'inverse, sur la, même période, le nombre de visiteurs sur mobile a grimpé de 44% ». D'après le journaliste du site, l'encyclopédie, qui a lancé sa première application mobile par le système d'exploitation Android en 2009, a mis du temps pour s'y mettre et « proposer ses fonctionnalités sur le mobile, en particulier l'édition des contenus », tandis que sur les téléphones intelligents, elle « a laissé le champ libre à d'autres applications ». En 2013, l'encyclopédie se lance dans une nouvelle stratégie mobile avec une application Android rénovée, comportant des « fonctionnalités d'édition et de navigation », et ajoute même, selon lefigaro.fr, en mai 2013, « une fonction géolocalisation à son site Web et mobile. Elle permet de lire des articles liés à notre position géographique. » Tout récemment, une autre innovation vient d'être introduite par l'encyclopédie qui a complètement, rapporte lefigaro.fr « refondu son application iOS » et introduit « une grande nouveauté : la possibilité de modifier des articles directement depuis son Smartphone ». Elle a ainsi communiqué, fin juillet passé, sur la mise à jour de son application pour mobile avec « un design retravaillé pour un meilleur confort de lecture » et une tendance à une navigation accélérée dans l'application, selon le figaro qui rapporte, également, d'autres innovations comme « la possibilité de modifier les articles depuis son Smartphone », ou « de sauvegarder les articles pour les lire plus tard même hors connexion ». Si l'encyclopédie doit trouver les palliatifs nécessaires à une adaptation imposée aux mutations que vivent les entreprises du monde de l'internet, il est d'autres difficultés, inhérentes à son propre mode d'organisation et de fonctionnement et que les observateurs reconnaissent à la baisse inquiétante du taux de contributeurs ; « Wikipédia est en pleine crise d'adolescence » pour le site lefigaro.fr qui estime que « le nouveau défi du site n'est pas tant de recruter de nouveaux membres que de garder ses fidèles contributeurs ». Pour illustrer cette tendance, le site du quotidien français dresse ce constat : « le nombre des ‘'wikipédiens'' actifs au sein de la version anglophone de la plateforme ne cesse de diminuer. Au plus fort de sa popularité, en 2007, Wikipédia rassemblait plus de 90.000 contributeurs actifs dans le monde. Il en a perdu presque 20 % depuis, avec près de 73.000 utilisateurs actifs ». Dans sa quête d'explication pour ce déclin, lefigaro.fr se tourne vers le mode de production des contenus de l'encyclopédie et découvre que depuis sa crétaion, il y a « treize ans, Wikipédia a progressivement perdu son attrait de nouveauté. Les utilisateurs de la première heure se sont lassés. Les nouveaux venus n'ont pas autant de liberté qu'auparavant, puisque les plus gros articles sont déjà achevés. » La rigidité de la structure de production des contenus de Wikipédia est par ailleurs pointée du doigt par Marc Foglia, auteur d'un livre paru en 2008, intitulé « Wikipédia média de la connaissance démocratique ? Quand le citoyen lambda devient encyclopédiste » qui confirme le constat de manque de diversité des contributeurs fait par le journal en soutenant que « l'utilisateur typique est un homme blanc, d'une trentaine d'années, bardé de diplômes et vivant en Europe ou aux Etats-Unis ». Interrogé par le site du quotidien français, la directrice exécutive de wikimedia France, Nathalie Martin, fait état de nombreuses initiatives pour diversifier les horizons de recrutement et aller sur de nouveaux créneaux susceptibles d'attirer de nouveaux membres vers l'encyclopédie. Afin de « se renouveler, pour éviter toute lassitude, explique-telle au journal. Elle donne quelques exemples d'actions, comme le lancement « des groupes régionaux qui utilisent les outils ‘'wiki'' pour valoriser le patrimoine français » ou encore cette approche vers les femmes à travers un travail commun de la fondation « avec L'Oréal et l'établissement Universcience pour organiser la première journée consacrée aux femmes scientifiques et à Wikipédia » et enfin une opération d'élargissement de l'horizon vers les terres africaines qui a fait que, écrit le site lefigaro, « en 2012, la fondation a signé un partenariat avec l'Institut français et l'Agence universitaire de la francophonie, donnant naissance au projet Afripédia. Le dispositif a depuis été déployé dans une quinzaine de zones, en Afrique centrale et de l'Ouest. » La structure d'organisation de l'équipe rédactionnelle de l'encyclopédie n'est pas confrontée qu'à ce problème de rigidité, source de désamour et de désaffection. Sur le site http://branchez-vous.com, un article mis en ligne le 25 juillet dernier nous apprend que « Wikipédia bloque les changements provenant du Congrès américain », en réaction à des pratiques douteuses d'agissements sur les contenus de l'encyclopédie survenus depuis le siège du Congrès américain. Selon ce site, la mesure de blocage mise en œuvre à cette date « survient suite au vandalisme de nombreuses pages concernant des politiciens, des entreprises et des événements historiques. Ces modifications ont été apportées par un utilisateur anonyme connecté à partir d'un ordinateur de la Chambre des représentants ». Pour illustrer ses constatations, wikipedia aurait ainsi évoqué quelques modèles de « trucages », opérés depuis le congrès américain, notamment, écrit branchez-vous.com, « la page sur l'assassinat de John F. Kennedy, où l'on pouvait y lire que Lee Harvey Oswald avait agi « au nom du régime de Fidel Castro ». Celle au sujet du premier alunissage a été changée pour dire que les théories conspirationnistes ont été « promues par le gouvernement cubain ». Ces opérations malveillantes auraient été rendues possibles suite à « la mise en ligne de plusieurs comptes automatisés sur Twitter qui rapportent les modifications de pages Wikipedia réalisées à l'intérieur de différents gouvernements » rapporte le site.