Boko Haram a de nouveau frappé au Nigeria. C'est dans la grande mosquée et la rue adjacente de Kano, la principale ville du Nord à majorité musulmane, que la main criminelle a sévi contre les fidèles, en pleine prière du vendredi. Son triple attentat meurtrier a fait 120 morts et 270 blessés. Par delà les représailles menées contre l'émir de la grande mosquée de Kano, appelant la semaine dernière à prendre les armes contre Boko Haram, le spectre du terrorisme présente une sérieuse menace contre la stabilité du Nigeria qui a consenti un lourd tribu (13.000 morts en 5 ans) et confronté à un afflux massif des déplacés et des réfugiés en quête de sécurité. La montée en puissance de Boko Haram a provoqué une fuite désespérée vers le Niger voisin (3.000 personnes), au Cameroun (39.000) et au Tchad (2.800). Le cas dramatique de la ville de Damassak, aux mains de Boko Haram depuis le 24 novembre, traduit le règne de la terreur imposé à une population désarmée. Dans une conférence de presse à Genève, le porte-parole du HCR (Haut-Commissariat des Nations unies pour les réfugiés), dresse un tableau effrayant : des Nigérians dans l'attente d'un bateau pour franchir la rivière Komadougou Yobé séparant le Nigeria et le Niger ou tentant pour d'autres une traversée à la nage pour échapper à l'engrenage meurtrier de la violence criminelle qui n'a épargné ni enfants, ni femmes, ni vieillards. Quelque 700.000 habitants sont forcés à l'exil interne dans les Etats de Borno, Yobé et Amadoua. Cette guerre illégitime contre les civils exprime clairement la dérive sanglante du terrorisme à visage religieux qui s'attaque désormais à un symbole clé de l'Islam : la mosquée. Le président nigérian Goodluck Jonathan entend remuer « ciel et terre » pour traquer le « terrorisme sous toutes ses formes ». Il a appelé les Nigérians à ne pas céder au chantage et à ne pas « désespérer mais de rester unis pour affronter l'ennemi commun ». L'attaque insensée cde Kano, qui « porte la marque de Boko Haram et marque le mépris du groupe pour la vie humaine », est perçue par le département d'Etat américain comme une tentative de déstabilisation du Nigeria soutenue militairement, depuis l'enlèvement en avril des 200 lycéennes, pour combattre « l'extrémisme violent ». Elle a été également condamnée par le SG de l'ONU, Ban Ki-moon, et son représentant spécial pour l'Afrique de l'Ouest. Mais, il reste à savoir si, comme pour le cas de Daech en Syrie et en Irak, le Daech nigérian sera soumis au même traitement de choc ?