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Le jumelage et la télémédecine, premiers palliatifs
Santé dans le Sud
Publié dans Horizons le 04 - 04 - 2015

L'opération de jumelage entre les centres hospitalo-universitaires (CHU) et les hôpitaux des Hauts-Plateaux et du Grand-Sud est l'une des solutions envisagées pour assurer une meilleure prise en charge des patients, notamment dans les régions où il y a un manque de médecins spécialistes. Mis en place ou en cours de l'être, ce dispositif commence déjà à porter ses fruits. C'est notamment le cas du CHU de Sétif jumelé avec l'hôpital de M'sila. « L'opération permet une meilleure organisation des rendez-vous des patients vu que les médecins sont appelés à partir de Sétif à M'sila pour assurer une prise en charge locale de certains patients. Dans le cas où un besoin en moyens plus sophistiqués qui n'existent que dans les CHU est exprimé, on établit un programme de transfert de malades qui peuvent être examinés par le médecin traitant dès son arrivée », a souligné le directeur de la santé et de la population (DSP) de Sétif, Abdelkader Baghdouss.
Tout sur le jumelage des hôpitaux
Dans le même contexte, le centre anti-cancer (CAC) de Sétif, opérationnel depuis juillet 2014, avec une mise en marche de trois accélérateurs de particules et la formation d'un personnel dans cette spécialité, prendra en charge les malades de plusieurs wilayas du l'est et du sud-est du pays. « Nous avons commencé par la prise en charge de 60 patients et maintenant nous avons atteint le nombre de 180 par jour, ce qui nous a permis de réduire considérablement les délais des rendez-vous qui sont actuellement deux mois seulement. Cela nous a aussi permis de prendre en charge des patients des wilayas de l'Est, du Centre et du Sud », a précisé le même responsable. Cette nouvelle acquisition coïncide avec le « lancement du plan cancer 2015-2019 qui focalise sur le patient et les formations initiées par le ministère de la Santé en cancérologie au profit des médecins généralistes, ce qui permettra aux centres de santé et aux polycliniques d'assurer certains soins afin de diminuer la charge sur les hôpitaux ». L'établissement public hospitalier de Ghardaïa est jumelé avec le CHU de Beni Messous et l'établissement hospitalier spécialisé de Douéra à Alger. L'opération s'est concrétisée il y a un mois. « Nous avons mis en place ce jumelage surtout pour la pathologie traumatologie. Il y a une équipe de médecins à Ghardaïa qui est en train de collecter les données sur les malades selon la disponibilité des moyens matériels. Cette équipe va se rendre à l'EHS de Douéra pour discuter des cas en vue d'un éventuel déplacement de l'équipe pluridisciplinaire sur place. Cette première expérience va éventuellement concerner une prothèse du genou, une prothèse totale de la hanche, et aussi pour les membres supérieurs », a noté le DSP de Ghardaïa, le docteur Djamel Beradjini, estimant que cette action est très bénéfique pour les habitants de Ghardaïa qui n'auront plus à se déplacer à Alger. Le docteur Beradjini prévoit la finalisation de cette première opération dans un mois. Plusieurs autres opérations ont été conclues avec le CHU de Beni Messous dans la spécialité de l'ophtalmologie. « Nous avons fait un diagnostic sur les prothèses oculaires. Une équipe s'est déplacée pour poser le diagnostic. L'opération a eu lieu en collaboration avec la DAS pour la prise en charge de 14 prothèses oculaires. Cette première opération est réussie à 100% », a-t-il indiqué. Située à 600 km d'Alger, Ghardaïa reçoit les malades d'In Salah, de Tamanrasset, de Timimoun et même d'Ouargla. Plusieurs infrastructures sont en cours de réalisation « afin de renforcer les capacités d'hospitalisation ». Il s'agit notamment de la réalisation d'un nouvel hôpital en remplacement de celui du chef-lieu de wilaya, d'une école paramédicale, d'un hôpital de psychiatrie, d'un centre intermédiaire de toxicomanie, d'un centre des brûlés (120 lits) et d'un hôpital de 120 lits à Guerrara.
Des défis à relever pour le CHU Mustapha-Pacha
Le CHU Mustapha-Pacha d'Alger est jumelé aux hôpitaux de Tamanrasset, Ouargla et Biskra. « Le jumelage répond aux besoins réels des populations notamment là où il y a insuffisance de médecins spécialistes. Cela nous permet d'envoyer des équipes pluridisciplinaires pour la prise en charge des malades sur place », explique le directeur du CHU, Rabah Bar. « A long terme, l'objectif de ce dispositif est de stabiliser les équipes médicales dans ces régions. Car lors de ces missions, le personnel propose le renforcement des équipements, l'ouverture de certaines spécialités. C'est en offrant toutes ces conditions que les gens seront motivés à s'y installer définitivement », a-t-il ajouté. Plusieurs sorties sur le terrain ont été effectuées à Tamanrasset, Ouargla, et récemment à Biskra depuis la conclusion de ce jumelage. « Nous avons réalisé plusieurs opérations surtout à Tamanrasset. Des patients ont été pris en charge en ophtalmologie, en orthopédie, en pédiatrie et en gynécologie. Nous avons recensé plus de 400 consultations par sortie et procédé à la création d'un couloir vert au niveau de l'hôpital Mustapha-Pacha pour la prise en charge de ces malades transférés dans ce cadre », précise Bar. Le directeur de la santé de Tamanrasset, Amar Bensenouci, se réjouit de l'opération de jumelage avec le CHU Mustapha. « Nous avons tracé un programme et entamé sa concrétisation lors du dernier trimestre 2014. Une équipe du CHU Mustapha-Pacha est venue et un couloir vert consacré aux patients qui se déplacent de cette wilaya frontalière pour bénéficier d'une prise en charge dans toutes les spécialités et dans les urgences a été installé. Quatre visites de médecins par an sont programmées. Outre la prise en charge des patients, ce jumelage va engendrer un apport en matière de formation sur place », souligne-t-il. Une autre opération de jumelage est en préparation entre l'hôpital d'In Salah et le CHU Mustapha pour régler le problème crucial du manque de médecins spécialistes à In Salah. « Il reste à trouver les moyens financiers pour le concrétiser », a indiqué le DSP de Tamanrasset. La présence de médecins cubains depuis trois ans à In Salah et depuis août 2014 à Tamanrasset vient aussi combler le déficit et régler le problème du service civil. Reste que pour lui, l'apport des médecins algériens reste souhaitable à condition de le renforcer, « ce qui n'est pas évident pour le moment ». En outre, l'éloignement des villages et communes du chef-lieu de wilaya constitue un problème. « Les habitants de la bande frontalière souffrent énormément. L'évacuation d'un malade de Tinzaouatine vers Tamanrasset sur une piste fait que ce dernier arrive dans un état lamentable. On organise des missions de spécialistes vers ces zones mais cela demeure insuffisant. C'est une opération qui dépend du nombre de spécialistes dont on dispose », regrette Bensenouci. L'EPH de Naâma a bénéficié d'un jumelage avec le CHU de Tlemcen. « Nous avons décidé quatre missions entre l'EPH et le CHU de Tlemcen. Deux missions ont été effectuées avec un premier déplacement de médecins (ORL, maître-assistant, résident et gastrologue) du CHU pour la consultation de 40 malades et un deuxième pour l'ORL où les médecins, faute de spécialistes, sont venus faire des consultations pour des malades nécessitant une intervention. La troisième mission est programmée pour la semaine prochaine et elle concerne d'autres spécialités », a indiqué le sous-directeur des services de santé de l'EPH de Mecheria, Achour Benbrahim.
Les premiers pas de la télémédecine
Autre nouveauté dans le monde médical : la télémédecine. Le CHU de Sétif est en train d'installer ce système à partir des blocs opératoires. « Nous sommes en phase de réalisation de notre data center pour lancer la télémédecine et faire bénéficier les autres wilayas du savoir-faire de notre personnel médical », relève le DSP de Sétif, Abdelkader Baghdouss. Plusieurs spécialités sont au programme, à savoir la traumatologie, la chirurgie générale et la cancérologie. « Nous sommes en train de finaliser le service de chirurgie cancérologie qui va permettre aux chirurgiens se trouvant dans le Sud de ne pas déplacer les malades. Il va y avoir un travail avec eux à distance », résume-t-il. Le système de télémédecine sera opérationnel à Sétif avant la fin de l'année en cours, selon Baghdouss. A Ghardaïa, un projet identique est en train de voir le jour. « La plateforme technique est prête, les équipements ont été installés. La prochaine étape sera les essais techniques », assure le DSP de la wilaya, précisant que l'hôpital avec qui cette opération sera conclue n'est pas encore désigné, mais « ce sera probablement le CHU Beni Messous avec qui nous sommes déjà jumelés ». Quant au CHU Mustapha-Pacha, il a achevé l'installation des équipements qui devront faire fonctionner le système de télémédecine. « Nous sommes en phase des essais techniques », signale son DG. « Nous allons être raccordés à 12 hôpitaux du Sud algérien, ce qui évitera aux patients des déplacements jusqu'à Alger pour une simple consultation. Cela sert aussi à la formation du corps médical et paramédical », ajoute-t-il. Cela ne constitue-t-il pas une charge supplémentaire pour cet hôpital ? « Il y a 48 spécialités au niveau du CHU Mustapha. Ces deux dispositifs (jumelage et télémédecine) sont bénéfiques aux populations et au corps médical. Ils nous permettent de dispenser une formation et de faire de la recherche sur les pathologies existantes dans ces régions », soutient-il. Entamé au CHU Lamine-Debaghine (ex-Maillot) de Bab El Oued, la télémédecine y fonctionne sans aucune difficulté. Le CHU est relié aux hôpitaux de Laghouat et de Béchar. « Cela fonctionne très bien vu que chaque lundi, il y a une séance de travail entre les personnels des trois hôpitaux », a indiqué une source du ministère. Et si l'installation des équipements de télémédecine au niveau de Tamanrasset est prévue pour le 24 avril prochain, le même projet bute à Nâama sur un problème technique lié à la non-disponibilité du réseau de la fibre optique. « L'étude a été lancée pour l'installation de ce réseau. Nous espérons lancer le système de télémédecine à l'occasion de l'inauguration de l'EPH de Mecheria », souhaite Benbrahim.
La réunion de tous les espoirs
La santé dans la région du Sud sera au centre d'une réunion prévue dans les prochains jours à Ouargla. « La réunion d'Ouargla se prépare et il est prévu que chaque établissement se spécialise et prenne en charge une partie de cette vaste région de notre pays », a indiqué le SDP de Sétif. « Notre wilaya, plus particulièrement le CAC, est certainement concerné et sera appelée à s'occuper des patients de certaines wilayas. Ainsi, au lieu que les malades errent à la recherche d'un rendez-vous, nous allons les accompagner dans les meilleures conditions », souligne-t-il. La DSP de Ghardaïa proposera, à l'occasion de ce rendez-vous, une mouture sur le dossier de complémentarité. « Compte tenu des distances qui sont importantes entre les wilayas du Sud, il faut penser à créer des pôles en médecine à travers la spécialisation de chaque wilaya dans une filière précise », recommande-t-il. Pour lui, le renforcement des moyens d'évacuation constitue le point cardinal pour relever le défi de l'amélioration de la prise en charge sanitaire dans le Sud. « Il est important d'assurer des moyens d'évacuation de qualité de manière à transférer les malades dans de bonnes conditions », précise-t-il. Pour le DG du CHU Mustapha-Pacha, la priorité doit être accordée à la formation. « Il y a un programme de construction de CHU pour mieux prendre en charge les citoyens dans le Sud. Notre rôle est de se déplacer et de former ces gens sur place afin d'assurer rapidement l'encadrement nécessaire pour le fonctionnement de ces établissements. » Le DSP de Tamanrasset estime, pour sa part, nécessaire d'avoir une vision globale pour le Sud en matière de personnel et de moyens. « La première mesure qui me semble importante à prendre, et à titre transitoire, est la réservation d'un quota de paramédicaux, de médecins et de spécialistes de manière à permettre aux autochtones d'accéder aux études en médecine », suggère-t-il. En outre, un intérêt particulier doit être accordé au problème de l'éloignement. « Il est important d'assurer l'accessibilité aux soins. Le système actuel de santé est urbain. Pour les régions du Sud, il faut qu'il soit mobile. Aussi, il faut des moyens humains et matériels pour aller vers les populations qui ne peuvent pas accéder aux soins. » La réunion d'Ouargla doit, selon lui, se pencher sur le manque de médecins spécialistes, notamment dans les spécialités de base. Pour les urgences, il propose la création d'un hôpital avec une autonomie de gestion et de financement. Il y a également lieu de mettre en place le transport aérien des malades vers les CHU et les centre urbains. Il souhaite aussi trouver une solution pour équiper les logements des médecins spécialités en leur accordant une indemnité à cet effet.


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