La question des migrants, révélée par le drame de la Méditerranée, hante l'Europe. Face à la vague incessante des migrants « politiques », venus de Syrie, d'Irak, d'Afghanistan et d'Erythrée, et des migrants « économiques » essentiellement subsahariens débarquant sur les côtes italiennes, le Vieux Continent ne parle pas de la même voix. Il y a deux jours, à Luxembourg, la rencontre des ministres de l'Intérieur n'a pas permis de dégager un consensus sur le mode de répartition « solidaire » des demandeurs d'asile voulu par la Commission européenne pour tenter de desserrer l'étau sur la Grèce et l'Italie, totalement submergées. La crise humanitaire a pris une ampleur considérable et tragique. En 2014, il y a eu trois fois plus de réfugiés et des irréguliers que l'année dernière. La piste méditerranéenne est privilégiée. Elle a enregistré près de 220.000 arrivées (sur les 283.000 recensés) dont deux tiers des migrants ont trouvé la mort. En attendant la décision du sommet des chefs d'Etat et de gouvernement, prévu la semaine prochaine à Bruxelles, l'Europe, en rangs désunis, proclame pour moitié le refus du caractère obligatoire de la relocalisation et, pour une bonne dizaine d'entre eux, le caractère permanent du mécanisme de solidarité. La Hongrie ordonne la fermeture de sa frontière avec la Serbie. Elle prévoit la construction d'une clôture de 4 mètres de haut sur les 175 km de tracé frontalier entre les deux pays. Toute la pression pèse désormais sur Rome, sommée par Paris et Berlin de réguler l'arrivée des « migrants économiques » pour les empêcher de rejoindre le Nord, à travers les frontières française, suisse et italienne. La messe est dite. Le président du Conseil et son ministre de l'Intérieur, Angelino Alfano, se consacrent au « plan B » censé, en l'absence d'une solidarité de ses partenaires européens, en particulier la France, présenter une riposte adéquate. A Paris, à l'effet de contenir la poussée des camps de fortune notamment à Calais, point de passage vers la capitale française et l'Angleterre, le gouvernement a annoncé, hier, la création de 10.500 nouvelles places d'hébergement. Soit 4.000 pour les demandeurs d'asile, d'ici début 2016, 5.000 pour des étrangers ayant déjà obtenu l'asile et 1.500 places d'hébergement d'urgence pour les migrants vivant dans des campements sauvages, selon les ministères de l'Intérieur et du Logement. A l'issue du conseil des ministres hebdomadaire, le ministre de l'Intérieur Bernard Cazeneuve a validé le « plan français » qui, selon lui, n'a pas seulement pour vocation de « répondre à une urgence dictée par l'actualité récente » mais aussi d'apporter une réponse durable à des dysfonctionnements anciens ».