Si l'enquête diligentée pour faire toute la lumière n'a pas encore levé le voile sur ce drame, la communauté musulmane et la classe politique américaine s'inquiètent sérieusement sur la montée en puissance de l'islamophobie alimentée par les attaques incessantes du candidat républicain à la Maison Blanche, Donald Trump, décrétant l'interdiction totale de l'entrée du territoire à tout musulman et la fermeture des mosquées. Au cœur des débats de la campagne d'investiture pour la présidentielle, cette question sensible n'a pas laissé indifférents même ses rivaux du camp républicain qui, à l'image de Jeb Bush, l'a qualifié de « déséquilibré ». A la Maison Blanche, ses déclarations tonitruantes sont jugées « contraires à nos valeurs ». Le conseiller du président Barack Obama, Ben Rodes, a ainsi rappelé sur la chaîne CNN que « le respect de la liberté de religion est inscrit dans notre déclaration des droits (Bill of Rights) ». Face aux risques de dérapages, la grande peur de la communauté musulmane se légitime par le fait qu'il (Donald Trump) « donne aux gens le droit de s'en prendre à nous », a déploré Ahmed Shadeed, directeur d'un centre islamique. Le fait est-il déjà fait ? « Rien n'indique dans l'enquête préliminaire qu'ils aient été ciblés en raison de leur religion, a déclaré Henry Sautner, un inspecteur de police, soulignant l'absence de motivations du tueur. Mais la thèse d'un crime anti-musulman ne fait aucun doute pour les représentants de la communauté musulmane rassemblés samedi soir sur les lieux du crime pour fustiger le climat islamophobe ambiant. C'est dans le quartier d'Ozone Park, abritant une forte communauté musulmane originaire principalement du Bengladesh, que l'assassin a choisi de sévir contre l'imam et son assistant à la sortie de la mosquée Al-Furqan Jame Masjid abattus par derrière d'une balle dans la tête. Une simple coïncidence ? Aucune piste n'est privilégiée par les autorités qui examinent, selon Sarah Sayeed, du bureau du maire de New York, le double meurtre « sous tous les angles ». Dans un communiqué publié dimanche, le maire de New York Bill de Blasio a affirmé que « nous ne connaissons pas encore le motif de ces meurtres, ce que nous savons, en revanche, c'est que nos communautés musulmanes sont en permanence dans la ligne de mire de l'intolérance ». Cette réalité tragique est attestée par une étude de l'Université de l'Etat de Californie qui, se fondant sur une analyse des statistiques du FBI, révèle l'image de l'Amérique en proie, ces dernières années, à une moyenne de 12,6 crimes islamophobes par mois. Il ne fait donc aucun doute pour la communauté musulmane. « C'est un crime motivé par la haine de quelque manière qu'on le considère », assure Kobir Chowdhury, qui dirige la mosquée Masjid Al-Aman à Brooklyn, proche du lieu du crime. « Le doigt est clairement pointé sur les islamophobes coupables de haine envers les musulmans », estime la directrice de la principale association américaine de défense des musulmans pour la région de New York, Afaf Nasher, mettant en garde contre le silence qui permet à ces crimes de continuer. Assurément, l'islamophobe tue.