Aqueducs, fontaines, puits ou encore citernes font rarement l'objet d'un livre. Leur historique fait souvent partie d'autres travaux plus généraux et se limite alors à quelques pages. Cette fois-ci, Dalila Ouzidane a pris le sujet à coeur et en a réalisé un beau livre « Les eaux d'Alger sous la Régence ottomane, XVIe, XIXe siècles », paru cette année aux éditions Dalimen. Notons que cet ouvrage a été publié avec le soutien du ministère de la Culture, à l'occasion de la manifestation « Constantine, capitale de la culture arabe 2015 ». Dans la préface de ce beau livre de 261 pages, André Guillerme, professeur, titulaire de la chaire d'histoire des techniques au Cnam, et responsable de la chaire Unesco « Mémoire des métiers vivants », témoigne : « Dalila Ouzidane a longtemps battu dans ce qui fut autrefois la campagne algéroise pour repérer les traces des sources, des puits, des dizaines d'abreuvoirs, des cent cinquante fontaines (1830), de la soixantaine de moulins à eau, des lavoirs, des ruisseaux, des points et des traits devenus imperceptibles sous l'épaisseur du temps urbain. » André Guillerme poursuit : « Architecte pour construire, historienne pour comprendre, archéologue pour sauvegarder, elle est anthropologue pour enquêter, interroger, retrouver, comparer grandes eaux et petites eaux, déceler dans l'humidité superficielle la profondeur de la nappe phréatique. Puisant dans le folklore algérois, elle révèle d'abord les rites qui manifestent la crainte de la sécheresse et les mythes qui entourent les résurgences les plus abondantes de la baie d'Alger. » Une oeuvre « garnie » de connaissances et de savoir jaillissant après chaque page, poussant la curiosité à toujours savoir ce que la suite réserve à l'idée précédente, avec une lecture aisée adressée à un grand et large public. Dalila Ouzidane vulgarise le patrimoine historique des eaux d'Alger. Cet ouvrage, qui peut revêtir plusieurs formes, participe à la mémoire, tout en contribuant à la naissance d'un écrit neuf. La mise en valeur du patrimoine est le concept directeur qui nourrit le discours de cet ouvrage. Le livre se découpe en trois parties : le site et les eaux d'Alger, l'eau dans la médina (adduction et distribution), l'eau domestique et artisanale. Dalila Ouzidane a tenu à peaufiner son livre. La preuve, elle l'a soutenu par des notes préliminaires expliquant le système de translittération, les abréviations et le glossaire. On y apprend l'histoire urbaine d'Alger à travers la construction d'aqueducs, de nombreuses fontaines publiques... Dalila Ouzidane ponctue ce beau livre par de magnifiques cartes et gravures tirées des archives et des photos d'expertise. Elle lance, à travers sonlivre, un appel à restaurer les monuments de l'eau.A ce titre, les aqueducs, les citernes comme les fontaines publiques encore disséminées sur les anciens parcours méritent un intérêt particulier. En conclusion, l'auteure affirme : « L'histoire de l'eau urbaine est fondamentale à la compréhension de la sociabilité, à l'économie, au politique et à l'environnement. » Dalila Ouzidane, architecte de formation, est docteur en histoire des techniques du Conservatoire national des arts et métiers de Paris. Elle est maître de conférences à l'EPAU, après plusieurs années d'enseignement à l'Ecole supérieure des beaux-arts d'Alger, notamment sur la problématique de l'intervention des plasticiens dans la ville et sur les aménagements extérieurs. Ses travaux de recherche portent essentiellement sur la question hydraulique d'Alger à l'époque ottomane et l'alimentation en eau des cités du bassin méditerranéen en général. De par sa formation et sa qualification d'architecte des monuments et sites protégés, elle a participé à la restauration d'édifices majeurs, tels le Musée public national du Bardo et le Quartier des Janissaires de la Citadelle aujourd'hui achevée.