Elles étaient à la fleur de l'âge. A peine sorties de l'adolescence. Chacune d'elles menait une vie paisible à Oujda, ville marocaine qui les avait accueillies, elles et leurs familles. Dans les meilleures écoles de cette ville, elles poursuivaient leur scolarité. Studieuses ! Rien d'exceptionnel, si ce n'est que nous sommes en 1956, en pleine guerre de libération nationale, et qu'à cette époque-là, l'instruction des filles n'était pas très répandue dans la société algérienne. Aouicha, El Arem, Rabéa, Ghanoudja, Mansouraia… c'étaient leurs noms de guerre. Elles n'avaient rien de ces adolescentes insouciantes, plongées dans leurs rêves où un prince charmant viendrait les extraire de la monotonie du quotidien.Loin de ces chimères, à tout juste 16-17 ans, elles portaient en elles un seul idéal. Secrètement gardé au fond de leur tête bien pleine ; elles caressaient l'espoir d'une Algérie libre. La patrie, la révolution, le combat libérateur étaient pour elles la raison de vivre. Même si pour cela elles devaient affronter les tabous de la société et braver les interdits familiaux. Quitter la quiétude du cocon familial, rompre avec les convenances et emprunter les chemins de l'aventure exaltante, c'est dans cette voie qu'elles voulaient inscrire leur destin. Leur première tentative de rejoindre les maquis de l'ALN, à l'instar de tous les lycéens et étudiants algériens, fut infructueuse. Peu importe ! Il en fallait beaucoup plus pour contrarier la détermination de ces huit jeunes filles. Et puis, un jour, le destin rejoint le rêve. Un contact, une lettre et l'appel de la patrie. Sans hésiter, sans même un adieu à la famille, elles feront, ainsi, leurs premiers pas dans le long processus du combat libérateur…Elles entreront dans l'Histoire par la grande porte : les premières femmes algériennes à rejoindre les rangs du Malg. Un fait historique très peu connu, quasiment ignoré par la grande majorité de nos contemporains. Pourtant, cet épisode de notre glorieuse révolution mérite qu'on s'y attarde. Huit femmes, ou plutôt huit jeunes filles, activant sous la houlette du grand Si Mabrouk, auprès duquel elles apprirent le meilleur des enseignements, est un fait historique qui mérite lumière. Leurs noms de guerre, elles les doivent à ces monuments de la révolution de Novembre, Boumediène et Boussouf. Leurs pseudonymes n'étaient pas du tout anodins. Ils portaient en eux une charge affective très forte pour ces grands chefs de la guerre de libération. En vérité, c'étaient les prénoms des sœurs ou des mères de ces historiques. C'est dire l'affection et le respect qu'on leur vouait... Aujourd'hui grands-mères, ces grandes dames «malgaches» racontent leur vie, leur engagement, leur combat... Un parcours héroïque, une épopée fabuleuse mais toujours un amour, qui n'a pris aucune ride, envers leur patrie : l'Algérie. Un amour pour lequel elles ont tout sacrifié. Une histoire, celle de ces combattantes de l'ombre, qui reste à découvrir.