Selon son frère Tayeb, « après la finalisation des procédures d'usage, la dépouille mortelle sera probablement acheminée aujourd'hui ». Le défunt sera ensuite inhumé, demain, au cimetière d'El Kobia, du centre-ville de Skikda. Orphelin de ses deux parents, morts en martyrs durant la guerre de Libération, le célèbre auteur possède une œuvre abondante et protéiforme. Outre une traduction du Coran, il a signé notamment « Mohammed, prophète de l'Islam », « L'Islam et la raison », « L'Erotisme arabe » et « L'Islam en 100 questions ». Détenteur de diplômes universitaires, il était ces dernières années une figure familière des médias. Dans sa démarche, il alternait des écrits de spécialiste et d'autres où l'intention pédagogique est plus évidente. Grand connaisseur de la tradition Il était une personnalité très connue. Journaux, revues et télévisions se tournaient souvent vers lui sur les questions qui concernent de près ou de loin l'Islam et les religions. Né à Skikda en 1953, ses premiers écrits, au début des années 1980, ont alimenté les pages d'Algérie Actualité. Il y évoquait surtout des figures de la culture universelle. Le chercheur avait obtenu une licence en psychologie clinique à l'Université de Constantine et part en France au début des années 1980 où il s'est attelé à la préparation d'un doctorat en psychopathologie et psychanalyse. Enseignant dans plusieurs universités (Tunisie, Etats-Unis, Belgique, France...), son œuvre fut très imprégnée par sa formation. Il a depuis aligné près d'une quarantaine d'ouvrages. Certains, « L'Islam pour les nuls » et « Le Coran pour les nuls », étaient des réactions à chaud à l'actualité. « C'était un homme d'une immense érudition, d'une grande autorité morale », a affirmé Jack Lang, président de l'Institut du monde arabe, où il était souvent invité. « En cette période où les préjugés se multiplient, la parole solide, humaniste d'un homme comme lui manquera beaucoup », a ajouté l'ex-ministre. Au-delà de l'intérêt pour des problématiques religieuses, le corps et ses représentations ont pris une part importante dans ses écrits. Le livre qui le révéla en 1984 fut d'ailleurs « Le Corps en Islam ». Ainsi, il a patiemment dévoilé la littérature érotique arabe. Un de ses ouvrages porte le titre de « Le Kamasutra arabe ». Grand connaisseur de la tradition musulmane et de la langue arabe, il s'est toujours évertué à déconstruire le discours de ceux qui instrumentalisent la religion « pour formaliser des angoisses et les exploiter politiquement », ne cessait-il d'expliquer de sa voix posée. Si l'homme vivait depuis de longues années en France, il revenait régulièrement au pays et accordait des interviews aux médias algériens. Il a rencontré ses lecteurs au Sila et animé quelques conférences, notamment à Constantine et à Alger. Un de ses livres, « Dictionnaire amoureux de l'Algérie », fut consacré au pays où il sera enterré. L'anthropologue Malek Chebel est surtout apparu dans un contexte de raidissement comme le défenseur d'un « Islam des Lumières », titre d'un manifeste contenant 27 propositions paru en 2004. Sans tomber dans les travers d'une approche polémique, il récusait ce qu'il appelait « le détournement de l'Islam par ceux qui ont alimenté sa dérive sectaire ». Une voix se tait. Elle manquera, comme celle de Meddeb ou d'Arkoun, à une religion qui a besoin d'hommes de paix et de savoir.