Sonia Mekkiou, illustre comédienne, affirme que le beau, la solidarité et le dialogue entre les créateurs et les artistes du monde entier constituent le véritable art. Une source de réflexion sur le monde contemporain. Sonia est nourrie d'une longue expérience théâtrale. Elle préfère confronter le théâtre à l'actualité. Elle le livre tel qu'elle le conçoit, le vit, souhaiterait qu'il soit. Pour d'aucuns, Sonia, dont l'aura envahit l'espace scénique dès le lever de rideau, doit une bonne partie de son succès à son tempérament et à sa sensibilité de femme. Aura qu'elle transpose, consciemment ou inconsciemment, dans les personnages qu'elle interprète. « Qui d'autre qu'une femme peut transcender l'état d'âme d'une femme ? », réplique-t-elle. Forgée à l'école de Kateb Yacine, Benguettaf, Kaki et autre Alloula dans « Les bas fonds » de Gorki, partenaire de Ziani Cherif Ayad, Sonia estime que le recours à l'adaptation des œuvres classiques est une « preuve de l'universalité de l'humain, de ses douleurs comme de ses joies ». Revenant sur la symbolique émanant du rôle central de Houria dans « Devant les portes de la ville », Sonia souligne que « les épaules d'une femme ont toujours été toutes indiquées pour porter le marasme d'une société ». La femme, toujours la femme, centre de tout l'univers ; incarnation de tous les maux, de toutes les extases, affaiblie, fragilisée mais, pourtant, qui sait consoler, même si elle s'y connaît aussi pour tourmenter. Sans jamais perdre de temps, cette artiste n'a de cesse de construire un pont entre tous les pays du monde. L'originalité de Sonia tient dans sa modestie surprenante. Une interprétation envoûtante, sa façon de jouer, ont non seulement brisé la barrière de la routine, mais permis de «passer» l'émotion théâtrale et le charme que véhicule son art. Son théâtre à elle exprime toutes les sensations. Sa sympathie naturelle, tout fait d'elle une personne «aimante». Sa forte présence et son apport sont aussitôt remarqués au sein de son entourage familial et professionnel. Sereine et calme, Sonia apporte sa pierre à tout édifice ayant pour objet la promotion de la culture. Installée il y a un moment déjà à la tête du Théâtre régional de Skikda, Sonia loue la promotion de certains théâtres municipaux en théâtres régionaux, considérant cette démarche comme une «action réformatrice à même de propulser le théâtre en Algérie». Sonia relève l'importance d'investir dans le théâtre. Le théâtre en Algérie ? «J'y crois, j'y travaille», assure-t-elle. Le théâtre a permis à Skikda de s'adjuger une place de pôle d'attraction et de rayonnement culturels. C'est à travers les créations régulières que Skikda connaît un nouveau souffle artistique. Places publiques et esplanades de Skikda ainsi que d'autres lieux de la région vibrent à l'organisation des représentations théâtrales. Skikda, longtemps confinée dans une léthargie, connaît un regain d'activité la propulsant sous les feux de la rampe. Les délégations de différentes régions du pays et d'autres nations s'y sont relayées, créant un patchwork de sons et de couleurs. Les personnes rencontrées mettent en évidence la chance que leur offre Sonia d'apprécier le quatrième art dans toute sa diversité. Les productions théâtrales initiées par Sonia sont, de l'avis de nombreux Skikdis, une occasion de plus pour recréer cette vie culturelle et rehausser l'image d'une ville chaleureuse et hospitalière. Exercer ses responsabilités professionnelles tout en affirmant son attachement viscéral à la création théâtrale, est une prouesse qui exige du talent et de l'abnégation. Forts de cette expérience, les acteurs de la culture entendent persévérer dans cette quête du renouveau culturel à Skikda, dans l'espoir que le théâtre régional de Skikda soit auréolé de succès. L'avenir se présente avec optimisme pour l'essor du théâtre à Skikda. Le théâtre par ces nouvelles générations a encore de belles années à vivre et à assurer des perspectives prometteuses ainsi qu'une excellente relève. «LE THEÂTRE FAIT PARTIE DE NOUS» « Le théâtre est un langage qui a un espace, un temps et des gens qui représentent sa force et sa vitalité », a précisé cette professionnelle du théâtre qui a estimé que même s'il n'a pas une histoire comparable à celle du théâtre européen, le 4eart maghrébin a des racines lointaines qui se recoupent avec les traditions liées aux anciens conteurs populaires, au théâtre de marionnettes et au théâtre de l'ombre. Elle souligne la nécessité de développer et de promouvoir le théâtre afin de lui conférer une dimension créative et de le préserver de la déperdition, en s'appuyant sur des bases scientifiques universelles. Cette artiste a, de son côté, souligné l'importance de vulgariser le théâtre, d'abord dans la région de Skikda, puis sur le plan national. Car, il s'agit, selon elle, d'une question d'identité et de cachet spécifique à notre pays qu'il faut mettre en valeur et sauvegarder. «Le théâtre fait partie de nous, il devrait être connu par le large public et spécialement la jeunesse. C'est à nous de le faire découvrir et de le vulgariser à travers davantage de productions. Je pense que notre objectif majeur est d'amener les jeunes à comprendre la richesse de l'art théâtral. Je peux affirmer aujourd'hui que ce message est bien perçu au vu de l'intérêt que porte la jeunesse pour cet art », a-t-elle dit. Alors, malgré la timidité qui la fait parler à voix basse, presque un chuchotement comme une confidence, elle se penche sur le sujet qui « l'habite » : le 4e art. Car, dit-elle, c'est loin d'être une sinécure. Il s'agit, ici, d'un précieux savoir-faire qui avait ses maîtres et ses disciples. LES ANCIENS DRAMATURGES, DES ŒUVRES INTARISSABLES «C'étaient des hommes de grande carrure, au sens physique, intellectuel et humain », a souligné Sonia pour décrire les anciens dramaturges tels Alloula, Kateb Yacine et bien d'autres hommes de théâtre dont elle garde également l'image « de personnes enracinées dans leur société ». Elle considère, par ailleurs, que « leur œuvre est toujours d'actualité », estimant que leurs pièces n'ont pas pris une ride au regard des sujets qu'elles abordent ». Sonia se permet ainsi d'évoquer la dimension humaine de ces dramaturges de par leur mobilisation constante aux côtés des personnes démunies ou affectées par de graves pathologies. Il ne faut surtout pas conclure que Sonia soit vaniteuse. Ce sont ses collègues qui certifient qu'elle s'impose désormais comme l'une des meilleures comédiennes sur la place d'Alger. Des productions complexes, subtiles, d'une grande richesse émotionnelle. Sonia cherche à répondre aux goûts multiples de son public et multiplie les thèmes reflétant le vécu et inspirés de la réalité sociale et parfois du terroir, introduisant des scènes expressives en interaction avec le public, sans pour autant exclure l'improvisation. « Je ne veux pas que nos comédiens tombent dans l'imitation aveugle. Je préfère qu'ils innovent comme on l'a appris de nos aînés, dont certaines de leurs pièces sont gravées dans la mémoire collective ». Aujourd'hui que Sonia est à la tête du théâtre régional de Skikda, elle s'est assignée des objectifs à atteindre, entre autres assurer une activité théâtrale permanente, diffuser des spectacles, participer aux différentes manifestations, organiser des spectacles, découvrir de jeunes talents... Le théâtre demeure une grande actualité dans sa conception et sa forme. Le génie de ce théâtre est d'avoir réussi à donner un condensé et une quintessence de la richesse et de la profondeur au 4e art. En tout cas, son action sur la jeunesse est apaisante, enrichissante et bienfaitrice. En tout cas, la pratique du théâtre laisse Sonia Mekkiou très jeune. D'âge et d'esprit.