Le conflit interconfessionnel entre musulmans et chrétiens a resurgi une nouvelle fois en Egypte. Après une trêve durant le mouvement révolutionnaire, les deux communautés religieuses ont renoué avec la violence. Samedi soir, des affrontements dans le quartier populaire, Imbaba, dans le nord-ouest de la capitale égyptienne, ont fait douze morts et plus de 200 blessés, dont seize dans un état grave. Citant des responsables du ministère de la Santé, la télévision d'Etat a annoncé qu'il s'agissait de quatre chrétiens et de six musulmans, les corps des deux autres victimes n'ayant pas encore été identifiés. Les heurts ont eu lieu lorsque des jeunes de la communauté musulmane ont attaqué une église chrétienne copte, Saint-Mina, en assurant vouloir libérer une femme chrétienne qui serait selon eux détenue après avoir voulu se convertir à l'islam. Des soldats et des policiers anti-émeutes, présents sur les lieux, ont tiré en l'air pour tenter de séparer les deux camps. Les services de sécurité ont également confirmé que des «voyous» ont incendié l'église de la Vierge Marie. Redoutant une escalade de la violence entre les deux communautés, le Premier ministre égyptien Essam Charaf a convoqué une réunion de crise du cabinet et reporté une visite aux Emirats arabes unis. «Le Premier ministre a convoqué une réunion d'urgence du cabinet pour examiner les évènements regrettables à Imbaba», a déclaré Ahmed al-Saman, porte-parole du cabinet, précisant que M. Charaf «a décidé de reporter sa visite à Bahreïn et aux Emirats arabes unis qui était prévue aujourd'hui (dimanche)». A l'issue de cette réunion, le gouvernement a réaffirmé ses engagements concernant la sécurité nationale, promettant de prendre des mesures fermes contre les attaques de lieux de culte. «Les autorités vont frapper d'une main de fer tous ceux qui cherchent à nuire à la sécurité de la nation», a déclaré le ministre de la Justice, Abdel Aziz al-Gindi. « Le gouvernement va appliquer de manière immédiate et ferme les lois qui criminalisent les attaques contre des lieux de culte et contre la liberté de croyance», a-t-il ajouté, assurant que les lois antiterroristes seraient utilisées contre les fauteurs de troubles. Le gouvernement égyptien a, par ailleurs, ordonné un dédommagement de 840 dollars pour les familles des victimes et 336 dollars pour celles des blessés. De son côté, l'armée a annoncé que 190 personnes ont été arrêtées après les heurts. Dans un communiqué, elle a ordonné «le transfert de toutes les personnes arrêtées en liaison avec les événements de samedi soir et dont le nombre s'élève à 190 pour qu'elles soient déférées devant la cour militaire suprême». Le texte exhorte «toutes les communautés en Egypte, les jeunes de la révolution et les théologiens musulmans et chrétiens à s'opposer fermement aux tentatives de groupes obscurantistes de torpiller l'unité nationale». D'ailleurs, juste après les affrontements, un général, s'exprimant à la télévision d'Etat, avait assuré que l'armée ne permettrait pas «à quelque courant que ce soit d'imposer son hégémonie en Egypte». Les derniers affrontements entre musulmans et chrétiens qui remontent au mois mars, ont fait au moins treize morts. Les Coptes, ou chrétiens d'Egypte, représentent entre 6 et 10% des quelque 80 millions d'Egyptien. Présents en Egypte depuis les premiers temps du christianisme, ils s'estiment discriminés et marginalisés.