Les élections présidentielle, régionales et législatives commenceront aujourd'hui au Soudan, un pays de 40 millions d'habitants dont 16 millions d'électeurs. L'opposition, notamment le Mouvement populaire de libération du Soudan (SPLM) du regretté John Garang et le parti Umma, le vainqueur des législatives de 1986, a opté pour le boycott de ce triple rendez-vous après le refus de la commission électorale d'accepter un report «technique» de quelques mois du scrutin, le premier en 24 ans. Omar Hassan El Béchir, 66 ans, le chef de l'Etat, briguera un nouveau mandat en tant que candidat du Parti du congrès national (NCP, au pouvoir). En campagne, il a promis des élections «exemplaires, équitables, transparentes et propres». Il est quasi certain d'emporter ce scrutin, clef de voûte de l'accord de paix de Nairobi, signé en janvier 2005 après un quart de siècle de guerre civile entre le nord et le sud. Deux enjeux à la clef : le taux de participation et le pourcentage du futur président. El Béchir qui a vu sa popularité se renforcer après le mandat de la Cour pénale internationale n'aura pour rivaux que des candidats sans envergure après le retrait de Yassir Arman du SPLM et Sadek al Mahdi d'El Umma qui ont mené une campagne marquée par de nombreuses accusations. Hatim al-Sir, 50 ans, du Parti unioniste démocrate, Abdallah Deng Nhial, 56 ans, du Parti du Congrès populaire, Abdelaziz Khaled, 65 ans, de l'Alliance nationale soudanaise, Mounir Cheïkh ad-Din, 49 ans, des Forces démocratiques nouvelles, Fatima Ahmed Abdelmahmoud, 66 ans, de l'Union socialiste et démocrate soudanaise, sont, avec les indépendants (Kamil Idriss, ancien patron de l'Organisation mondiale de la propriété intellectuelle, Mahmoud Ahmed Juha Mohammed, 60 ans), des illustres inconnus. Selon toute vraisemblance, il deviendra dès la proclamation des résultats, vers le 18 avril, le premier président sous le coup d'un mandat d'arrêt international, reconduit par les urnes. Outre la présidentielle, les Soudanais auront à choisir parmi les listes de 66 partis dont le Parti du congrès national qui détient actuellement 52% des sièges de l'Assemblée nationale, leurs futurs représentants au Parlement. Ils auront à élire aussi les gouverneurs des 25 Etats du pays. Au Sud-Soudan semi-autonome, où les yeux sont braqués sur le référendum de janvier 2011, les électeurs voteront aussi pour le président du gouvernement de la région et les députés de l'Assemblée sud-soudanaise. Plusieurs analystes redoutent la recrudescence des tensions entre le nord et le sud qui se préparent pour le référendum d'autodétermination, prévu en janvier 2011, du Sud-Soudan, une région sous-développée de près de neuf millions d'habitants et dont 80% sont illettrés. Ils redoutent la reprise des violences au Darfour où la mission d'observation électorale européenne s'est retirée en «prenant acte de l'impossibilité d'accomplir sa tâche dans cette région». Des députés européens et arabes sont inquiets. Craignant des violences, ils demandent aux garants des accords de paix de 2005 d'observer attentivement le scrutin. «Les choses seront encore pire après les élections», prévient Assir Arman. «Nous allons observer le scrutin de très près», assure Jimmy Carter dont la fondation remettra une évaluation préliminaire le 17 avril prochain.