Résumé de la 102e partie n La partie de bridge continue, et quand Mrs Perenna rentre, elle affirme qu'elle n'était sortie que pour voir quel temps il faisait... On mena les annonces à bien. C'était à Mrs Cayley de commencer. Elle eut recours à la plaisanterie traditionnelle : — Des milliers d'Anglais se sont jetés dans la Tamise pour n'avoir pas joué atout... Elle posa sur la table son neuf de carreau. — Vous joueriez jusqu'à la consommation des siècles, dites-moi ! tonna une bonne grosse voix profonde et cordiale. Haletante, les yeux brillants d'espièglerie et de malice, Mrs O'Rourke s'encadrait dans la porte-fenêtre. Elle fit un pas dans le salon. – On joue bien gentiment au bridge, hein ? dit-elle encore. — Qu'est-ce que vous avez dans la main ? interrogea Mrs Sprot, curieuse. — Un marteau, répondit Mrs O'Rourke, enchantée. Je l'ai trouvé dans l'allée. Quelqu'un doit l'avoir oublié. — Drôle d'endroit pour abandonner un marteau, fit remarquer Mrs Sprot. — Pourtant, c'est comme ça, souligna Mrs O'Rourke. Elle paraissait d'humeur particulièrement joyeuse. Balançant le marteau par le manche, elle se dirigea vers le hall. — Voyons, voyons, réfléchit miss Minton. C'est quoi, l'atout ? Le jeu put miraculeusement se poursuivre sans être interrompu pendant cinq minutes environ - en fait, jusqu'à l'arrivée du major Bletchley. Il avait passé la soirée au cinéma et se lança dans un récit détaillé de l'intrigue du Troubadour vagabond, dont l'action se situait sous le règne de Richard Cœur de Lion. Expert ès arts militaires, il critiqua longuement la manière dont le réalisateur avait mis en scène les batailles du temps des croisades. Le robre devait cependant demeurer à jamais inachevé, car Mrs Cayley, ayant regardé sa montre, s'aperçut avec des cris d'horreur de l'heure déjà avancée et se rua dans le jardin pour retrouver son mari. Ce dernier, posant avec volupté au grabataire abandonné, émettait une toux sépulcrale et était agité de frissons spectaculaires. — Ça va très bien, ma chère, ça va tout à fait bien. J'espère que vous vous êtes bien amusée. Moi, je ne compte pas, n'est-ce pas ? Aurais-je pris froid que ça n'aurait pas la moindre importance... Après tout, nous sommes en guerre, non ? Descendant le lendemain pour prendre son petit déjeuner, Tuppence nota aussitôt que l'ambiance était marquée d'une certaine tension. Mrs Perenna, lèvres pincées, se contenta d'émettre quelques remarques franchement désagréables et quitta la salle à manger sans chercher à dissimuler son agacement. Le major Bletchley, tout en couvrant un toast d'une épaisse couche de marmelade, se mit à ricaner ostensiblement. — L'ambiance est à la grisaille, gloussa-t-il. Tiens, tiens ! Mais, après tout, c'était à prévoir, non ? (à suivre...)