Visite n Barack Obama, sixième Président américain à se rendre à Moscou, aura fort à faire pour y ouvrir une nouvelle ère dans les relations diplomatiques russo-américaines. Bien que les deux superpuissances aient su momentanément surmonter leurs différences idéologiques et s'allier le temps d'une guerre pour affronter l'Allemagne nazie, leurs rapports sont demeurés tumultueux, y compris après la chute du communisme. Ni la bonhomie du charismatique tandem formé par Bill Clinton et Boris Eltsine, ni la célèbre expression de George W. Bush qui déclara avoir vu dans ses yeux l'«âme de Vladimir Poutine» n'ont pu dissiper la méfiance héritée du passé ou prévenir les conflits qui ont éclaté sur des thèmes comme la défense antimissile ou la Géorgie. C'est dans ce contexte complexe qu'Obama entend tourner la page sur la période Bush et appuyer sur la touche «reset» (redémarrer) lorsqu'il rencontrera son homologue Dmitri Medvedev et M. Poutine, qui bien que devenu Premier ministre, est toujours considéré comme l'homme fort du régime. Robert Legvold, professeur de sciences politiques à l'université Columbia, estime que les relations ont «déraillé» au cours de la dernière décennie avant d'«aller dans le mur» avec la guerre d'août 2008 en Géorgie. «La nouvelle administration a remis le train sur les rails mais ils sont très instables et ce processus risque encore de connaître des détours, des retards et des revers», prévient-il. Pour Konstantin Kossatchev, président de la commission des Affaires étrangères du Parlement russe, «la guerre froide s'achève mais elle n'est pas finie». «Pour qu'elle finisse, il faut que nous transposions les paroles en actes», affirme-t-il. Les spectres des années de guerre froide flottent toujours au-dessus de Moscou : cette semaine encore, la diplomatie russe organisait une grande cérémonie pour célébrer le 100e anniversaire de feu le diplomate soviétique Andreï Gromyko. Ministre des Affaires étrangères pendant près de 30 ans, il était surnommé «Monsieur Niet» (M. Non) en Occident pour son intransigeance. Pour Dmitri Simes, président du centre de recherche américain Nixon Center, nombre de responsables américains conservent en outre une vision dépassée de la Russie. «Je pense que les principaux dirigeants de l'administration sont sérieusement et sincèrement enclins à améliorer les rapports avec la Russie», juge-t-il. Mais à un niveau subalterne, il y a beaucoup de responsables qui n'ont pas renié les idées du passé», note-t-il. M. Obama va, quoi qu'il en soit, marcher sur les traces de Richard Nixon, devenu le 22 mai 1972 le premier Président américain à se rendre en URSS. La suivante, effectuée par Ronald Reagan en 1988. Se sont ensuite succédé Gerald Ford en 1974, et George Bush père en 1991, juste avant l'effondrement de l'Urss.