Langage n Une exposition entrant dans le cadre de la 1re édition du Festival international d'art contemporain (FIAC) se tient, depuis hier, au Musée d'art moderne d'Alger (Mama). Plusieurs artistes venus d'Afrique, d'Amérique latine, d'Asie, du Moyen-Orient et d'Europe prennent part à cette exposition qui met en scène des créations actuelles ; celles-ci dénotent des réalités artistiques nouvelles, contemporaines. Toutes traduisent le souci d'innover et de composer ou de conjuguer l'art à partir du présent. L'on peut alors s'attarder sur le travail de Myriam Aït El-Hara, une artiste algérienne, dont la spécialité est l'installation. Son travail consiste en deux créations : il y a d'abord un grand échiquier et divers ustensiles et autres objets domestiques (une lampe à l'huile, un récipient en cuivre...) utilisés en guise de pions. L'autre création est une autre installation : un bac de sable sur lequel sont disposés des masques au visage de femme. L'œuvre a pour titre El madfouna (l'enterrée ou l'inhumée). Cette œuvre est fort significative : elle illustre la condition de la femme dans les sociétés musulmanes, sociétés régies par la tradition et le diktat masculin. «Je ne cherche pas à plaire ou à déplaire», dit-elle. Et d'expliquer : «Mon travail est une irruption directe et violente que je considère comme un outil et non un produit.» «J'envisage d'emblée mon travail comme un objet qui exprime la vie dans toute sa banalité ou son importance», poursuit-elle. Et d'ajouter : «Je me retourne vers l'intérieur pour chercher profondément mes sources vitales afin de donner naissance à quelque chose dans le monde extérieur.» Ainsi, le travail de Myriam Aït El-Hara témoigne «de notre monde autant de nos hantises que de nos refoulements». Avishek Sen est un plasticien qui nous vient d'Inde. Son travail est la peinture, onirique et aux frontières d'un surréalisme imaginé et exubérant. Sur le tableau est représentée une main, sur la paume de celle-ci figurent un œil de côté et de l'autre une bouche béante ; des serpents s'enroulent sinueusement autour du pouce et de l'index. Figure aussi sur la peinture un petit bonhomme aux cheveux noirs, longs, debout sur un pied, celui de droite, les bras écartés, et portant une coiffe. Il se tient sur un doigt de la main, tel un équilibriste. Cette peinture aux couleurs fortes et chaudes s'inspire de la mythologie indienne, mythologie cependant transfigurée par un imaginaire qui, lui, est ancré dans une contemporanéité en mouvement. Le Sud-Africain Bieber Jodi expose des photographies en noir et blanc. Les sujets qu'il aborde et développe sont d'ordre social : il traite de la condition humaine. Les protagonistes qu'il prend en photo sont pauvres ; démunis, ils semblent égarés, désorientés, parfois effacés, abandonnés. Ils expriment la solitude et l'aliénation. Les photographies de Bieber Jodi relèvent alors d'un travail engagé. L'exposition se poursuit jusqu'à la fin du mois de février 2010. Elle comprend autant de créations que de façons d'approcher l'art, d'interpeller et d'interroger le monde – chaque œuvre exprime, à elle seule, une vision du monde contemporain et une manière d'appartenir à celui-ci, donc au présent, et de le définir dans sa beauté la plus saisissante comme dans sa laideur la plus accrue.