Animosité La légendaire amitié entre les Aït Medour et les Beni Fergane s?est transformée en une féroce hostilité. Arrivé sur la crête, Meziane défait les pans de son burnous qu?il avait enroulés autour de ses épaules pour marcher plus facilement et s?assied sur un rocher. Pendant un moment, il oublie ses soucis et contemple les pics du Djurdjura qui émergent de la brume. Certains sont couverts de neige. Le spectacle est grandiose... La montagne s?étend à perte de vue vers le nord, depuis Bouira jusqu?à Yemma Gouraya et Meziane s?emplit les yeux de la beauté du paysage, heureux et fier d?appartenir à cette terre bénie. Sur sa gauche, vers l?ouest, tout en bas, il aperçoit les villages des Bibans, petites taches blanches sur un fond de verdure... Puis, à mesure que le temps passe, le jeune homme revient à la réalité et à ses problèmes. «Je dois absolument parler à Da Mohand et tout lui expliquer... Il comprendra peut-être? Tassaâdit ne sera qu?à moi, je l?ai demandée en mariage et ce n?est pas cette stupide querelle entre nos deux villages qui va nous séparer.» Mais au fond de lui-même, Meziane est sceptique. Da Moh, qui préside la djemaâ, est connu pour sa fermeté, pour son intransigeance. Le jeune homme passe et repasse dans sa mémoire les derniers événements, la légendaire amitié des habitants d?Aït Medour et des Beni Fergane, issus de la grande famille des Beni Yala, qui s?est transformée en une féroce hostilité le jour où un paysan des Beni Fergane a détourné une partie du cours d?eau qui sépare les deux communautés... Quand il redescend lentement sur le chemin caillouteux, Meziane décide de ne pas perdre de temps. Selon la coutume du village kabyle, il doit d?abord parler de son problème à son grand frère, Hocine, qui a pris la place du père à la djemaâ. Mais il connaît son aîné et sait d?avance qu?il essuiera un refus méprisant. Mais peut-il seulement parler de ses sentiments pour Tassaâdit à son frère ? De loin, il voit le village des Beni Fergane, sur sa gauche, où vit sa bien-aimée. Meziane s?arrête un moment derrière un arbre pour ne pas être aperçu des vigiles qui montent la garde sur les «taâssasth», les points élevés qui entourent Béni Fergane. (à suivre...)