Résumé de la 105e partie n Victoria pense au retour à Bagdad où le répit de Tell Asouad ne sera qu'un lointain souvenir... Elle réfléchit. Elle avait décidé de quitter l'expédition avant l'arrivée maintenant imminente de Veronica (ou Venetia), mais elle n'avait pas arrêté les détails de sa retraite. Se contenterait-elle de disparaître purement et simplement, ou, avant de se retirer, libérerait-elle sa conscience par une confession complète ? Elle l'ignorait encore. — Je n'en suis pas sûre, dit-elle pour gagner du temps. — C'est ennuyeux, reprit Richard, parce que la police du district ne manquera pas de nous le réclamer, pour noter son numéro et relever tout ce qu'elle est censée avoir besoin de savoir de vous. Routine et paperasserie, bien entendu ! Faute de passeport, il faudra bien que votre nom et votre signalement lui suffisent. Au fait, Victoria, comment vous appelez-vous ? Victoria affecta de prendre la question en riant. — Allons, Richard, vous savez mon nom aussi bien que moi ! Il eut un petit sourire cruel. — Ce n'est pas tout à fait vrai, ce que vous dites là ! Votre nom, moi je le sais. Seulement vous, j'ai l'idée que vous ne le savez pas ! II la guettait à travers les gros verres de ses lorgnons. Elle rit. — Je serais bien la première personne au monde qui ne saurait pas son propre nom ! — Alors, dites-le !... Tout de suite ! Il avait parlé d'une voix brève et rude. Il poursuivit : — Inutile de mentir, la farce est jouée ! Vous êtes forte, je le reconnais. Votre personnage n'était pas mal campé, vous avez pu nous faire croire que vous aviez des connaissances, mais le rôle était difficile à tenir, je vous ai tendu quelques pièges et vous n'en avez évité aucun ! J'ai dit quelques énormités et vous les avez approuvées, sans l'ombre d'une hésitation. Il se tut quelques secondes, puis il ajouta : — Vous n'êtes pas Venetia Savile. Qui êtes-vous ? — Je vous l'ai dit quand vous m'avez rencontrée. Je m'appelle Victoria Jones. — Et vous êtes la nièce du docteur Pauncefoot Jones ? — Je ne suis pas sa nièce, mais, pour m'appeler Jones, je m'appelle Jones ! — Vous m'en avez raconté bien d'autres ! — Et je ne vous ai pas dit que la vérité ! Seulement vous n'avez pas voulu me croire, cela m'a exaspérée justement parce que c'était la vérité, et c'est uniquement pour vous obliger à me croire que je vous ai dit que je m'appelais Pauncefoot Jones !... C'est un nom qui a du prestige et je m'en étais déjà servit. Est-ce que je pouvais savoir que vous veniez ici ! — Ça a dû vous donner un coup !... Vous l'avez, d'ailleurs, fort bien encaissé ! Vous êtes restée d'un calme... — Extérieurement, peut-être... Mais j'étais anéantie... Seulement, je me suis dit que je préférais m'expliquer à l'arrivée... Ici, au moins, je serais en sûreté... — En sûreté ? Il la regardait, grave soudain. — Vous ne voulez pas me dire, reprit-il, que cette histoire abracadabrante que vous m'avez servie était vraie ? (à suivre...)