Désormais «illégaux» mais déterminés à faire entendre leur ras-le-bol de la crise et du chômage, les manifestants de la Puerta del Sol à Madrid restaient mobilisés, hier, à la veille d'élections locales annoncées comme un désastre pour les socialistes espagnols. Autour du «village» alternatif de tentes et de bâches en plastique bleu plantées sur la grande place populaire du centre de Madrid, des milliers de manifestants se sont à nouveau rassemblés dans la soirée, dans une ambiance festive et bariolée, au rythme des percussions brésiliennes. 60 000 personnes ont manifesté vendredi soir partout en Espagne, dont environ 20 000 à Madrid selon des estimations des médias. Aux cris de «maintenant nous sommes illégaux», une foule immense avait accueilli vendredi à minuit, sur la Puerta del Sol, le début de la trêve électorale, après avoir, aux douze coups de l'horloge, lancé symboliquement un «cri muet», rubans de scotch sur la bouche, bras levés au ciel. Des milliers d'autres manifestants se sont rassemblés dans les villes de province, dont Barcelone et Valence. Inédit, spontané et coloré, le mouvement dénonce l'injustice sociale, les dérives du capitalisme, la «corruption des politiciens» et se veut un laboratoire d'idées pour des réformes à venir. Surtout, il trahit la frustration de millions d'Espagnols face à un chômage record (21,19%), qui frappe près de la moitié des moins de 25 ans.