Paradoxe - Le châtiment corporel persiste et perdure au niveau de toutes les écoles publiques dans l'indifférence des autorités et malgré la loi qui peine à se faire respecter. Théoriquement et légalement, les châtiments corporels à l'école sont interdits. Mais «il se trouve hélas des enseignants qui recourent régulièrement à ce moyen pour corriger de façon humiliante des élèves terrorisés qui perçoivent ainsi ces enseignants non pas comme des pédagogues, mais comme des pères fouettards», relève Hamid Bouacida en tant que père de famille et écrivain. Il considère que «rien n'est plus avilissant que d'utiliser la violence comme argument. A fortiori à l'encontre des enfants dans l'incapacité de se défendre.» Pour maîtriser leurs élèves, les enseignants n'hésitent pas à faire usage de violence. Un état de fait qui peut s'expliquer par «un environnement à l'hostilité avérée notamment depuis ce qu'on appelle la décennie tragique qui a banalisé la mort.» Les enseignants en tant que partie intégrante du corps social ont été contaminés par cette violence, selon M. Bouacida. Celle-ci «s'exprime aujourd'hui à travers des rixes quotidiennes pour une place de parking ou de marché où les jeunes jouent du couteau avec une facilité déconcertante. Remarquez aussi la recrudescence de la violence dite «sportive» comme s'il existait une violence politique, une violence économique et pourquoi pas culturelle alors que toutes ces manifestations ne sont que les diverses faces d'une violence sociale.» Pour notre interlocuteur, «les châtiments corporels s'inscrivent dans cette configuration quand l'enseignant «oublie» son aura pédagogique pour donner des coups. Cela ne justifie en aucun cas la violence faite à des enfants dans le but évident de les humilier alors que ce sont leurs enseignants agresseurs qui se "dégradent", qui s'avilissent en infligeant de tels traitements.» Une réalité qui ne semble pas déranger pour autant certains parents qui ne voient pas de mal à ce que leurs enfants soient battus par leurs enseignants. Pis encore, «quand un élève est châtié par son instituteur, le père rapplique aussitôt et souvent ça tourne aux coups de poing», souligne M. Bouacida qui se souvient du bon vieux temps où les parents «allaient voir les enseignants pour leur demander justement de nous frapper pour nous corriger de notre turbulence. Paradoxalement, en ces temps-là les châtiments corporels se limitaient à des coups de règle sur les doigts. Aujourd'hui ils sont vraiment rares les parents qui demandent aux enseignants de frapper leurs enfants et c'est plutôt le contraire qui se produit.» Faut-il, cependant, «en vouloir à ces parents quand on sait que souvent les autres voies de recours sont inutiles et ne débouchent que rarement ? Pourquoi en arriver là, à violenter des enfants et s'exposer ainsi à la vindicte des parents ? Et qu'est-ce qui fait que les autorités ne réagissent pas en dépit des milliers de plaintes émanant des victimes ? Autant de points d'interrogation qui s'imposent lorsque l'on évoque ce dossier si sensible. Il n'en demeure pas mois que «les châtiments corporels ne sont qu'un volet du "sinistre " de l'école algérienne où assurément ce ne sont pas les chantiers qui manquent», poursuit M. Bouacida. Selon lui, la violence scolaire est confinée à une place secondaire voire accessoire, et est toujours évacuée au profit de problèmes jugés plus importants qui ne sont pas pour autant traités.