Destin En 1998, poussé par des raisons familiales, Hassan, 24 ans, quitte les bancs de l?université de Bouzaréah pour se lancer dans la vie active. Issu de la ville d?Adrar, il atterrit à Bouharoun. N?ayant pour métier que celui de préparer du thé à la manière des gens du Sud, ce savoir-faire lui vaudra d?être recruté par un restaurateur au port de Bouharoun, contre possibilité d?hébergement. «C?est un souci majeur qui ne me taraude plus l?esprit», dira Hassan El-Adrari, comme il plaît à son entourage de l?appeler. Le teint mat, le physique frêle, les yeux qui pétillent de gentillesse, ce jeune est arrivé à se fondre dans le paysage côtier, lui, l?enfant des dunes, devenu un acteur incontournable dans ce bazar touristique à l?algérienne. A travers lui, c?est tout Bouharoun qui rouvre ses bras à ceux qui veulent apporter un brin de fraîcheur et d?enthousiasme après une décennie orageuse. En effet, le terrorisme a obligé les habitués à se détourner de cette bourgade coincée entre le mont Sidi Rached et la grande bleue, n?ayant d?autres ressources que la pêche et le tourisme. Bouharoun plonge alors dans l?oubli en attendant des jours meilleurs. Chômage, toxicomanie, immigration, les forces vives ont déserté leur ville pour chercher le bonheur ailleurs. Une décennie plus tard, la commune sort petit à petit de sa torpeur. Les habitués des lieux y retournent pour retrouver un endroit qu?ils n?ont quitté que physiquement, puisque dans leur esprit subsistaient les souvenirs de promenades dans les vergers qui entourent la ville et des moments de détente passés au port de Bouharoun à regarder les pêcheurs décharger des casiers pleins de poissons qui leur seront servis frais sur les tables des restaurants qui bordent le port. Un plat copieux dégusté en famille «qui s?agrémente d?un verre de thé à la sahraouie». Le serveur du restaurant invitera donc ses clients à goûter la décoction faite sur place par Hassan El-Adrari. Tenus en haleine, les clients acceptent l?invitation. Hassan leur sert ce qu?il sait faire de mieux avec le sourire. Malgré sa timidité, il engage la discussion avec des clients étonnés de le voir atterrir aussi loin, devenant irremplaçable selon un client qui sirotait le thé de Hassan. Ce dernier, profondément croyant et armé de patience comme tous les gens du Sud, affirme être heureux de faire un travail que le destin lui a réservé. «Je rencontre, tous les jours, de nouveaux visages, je ne dois rien à personne et surtout je suis libre», dira-t-il placide.