Interrogation - Mais à l'extérieur de ces grandes agglomérations comment se nourrissent les travailleurs des chantiers industriels, mécaniques ou de la construction des routes ? Compte tenu de la précarité généralisée dans notre pays et de l'érosion du pouvoir d'achat qui en découle, les Algériens et surtout les travailleurs ont pris l'habitude de manger dehors à midi et de se rattraper le soir à la maison. Rares sont ceux qui quittent leur bureau ou leur usine pour déjeuner sauf en cas de circonstances exceptionnelles. Vous l'avez sans doute remarqué, mais dès qu'arrive l'heure du casse-croûte, la plupart des administrations sont vides. Secrétaires et employés prennent d'assaut les pizzerias. Nous ne parlons pas dans quelles conditions d'hygiène ces pizzas sont préparées en général, mais ce qui est sûr c'est quelles ne calment que la faim. Face à une demande de plus en plus croissante, de nombreux commerces se sont convertis en fast-food. Il n'y a plus de place à l'heure du coup de fusil, hommes et femmes se bousculent dans une incroyable promiscuité. Les pizzas sont préparées à la chaîne façon industrielle et souvent de qualité médiocre. A peine une table est-elle libérée qu'un autre groupe de clients la prend d'assaut sans même attendre qu'elle soit nettoyée et débarrassée de ses restes. Quelques pizzerias, pour améliorer l'ordinaire, proposent en plus de leur menu qui est toujours le même, des sandwichs. Le pain est trituré et servi par des mains qui ne sont pas toujours propres et l'huile des frites a le goût d'une huile de moteur à force de bouillir sans être renouvelée. Dans certaines grandes villes du littoral et particulièrement à l'ouest du pays des échoppes appelées pompeusement «restaurant akl khafif» ne servent que de la calantita. Avec 40 DA vous pouvez vous bourrer le ventre mais sans plaisir et sans appétit. Bien mieux, certaines familles nombreuses commandent des plats entiers pour déjeuner à la maison. Ce plat qui ne dépasse pas les 120 DA n'est pas copieux mais il a le mérite de couper la faim. Mais à l'extérieur de ces grandes agglomérations comment se nourrissent les travailleurs des chantiers industriels, mécaniques ou de la construction des routes ? De n'importe quoi en général, de casse-croûte préparés la veille à la maison, de fromages en portion, d'olives et de petit-lait quand le climat le permet. Quant aux familles traditionnelles dont le repas de midi est sacré, elles préfèrent réchauffer les restes de la veille et éviter les dépenses inutiles. On peut d'ailleurs le constater dans le fond de nos poubelles. Hormis les flacons, les sachets, les vieux médicaments et les bouteilles en plastique ainsi que quelques cartons, nos déchets sont de moins en moins organiques. La nourriture est rarement jetée sauf le pain quand il est rassis et encore des artisans le collectent pour un autre usage.