Analyse - Entre autres choses qui avaient attiré l'attention, figurait le constat de l'existence d'une représentation partagée par tous les nouveaux résidents, quelle que soit la qualité du fragment urbain dans lequel ils résidaient. L'analyse par les spécialistes du mouvement vigoureux d'urbanisation vécu par exemple par la commune de Draria en l'espace de quelques années seulement, caractérisé par l'installation dans des lotissements d'habitat individuel de populations plus ou moins aisées provenant dans leur majorité des quartiers centraux d'Alger, «nous avait permis de constater un certain nombre de phénomènes particuliers. Parmi ces derniers, le développement du processus de construction d'identités d'appartenance à la commune elle-même et aux différents lotissements résidentiels, devenus, au gré de leur peuplement et de leur consolidation sociale, des quartiers pourvus de fortes identités symboliques positives », explique un spécialiste. Entre autres choses qui avaient attiré l'attention, figurait le constat de l'existence d'une représentation partagée par tous les nouveaux résidents, quelle que soit la qualité du fragment urbain dans lequel ils résidaient : «Ils étaient convaincus d'appartenir à une catégorie d'urbains supérieure, celle ayant eu la chance à la fois de sortir de la promiscuité populaire du centre-ville d'Alger et d'occuper un espace urbain privilégié.» Et notre spécialiste de poursuivre : «C'est dans ce contexte que nous avons cherché à comprendre la manière dont ces nouvelles populations bidonvilloises, objet de mépris et de stigmatisation, ont négocié leur intégration sociale et symbolique à cet environnement particulier éminemment hostile.» Sur la base de l'exploitation d'une enquête qualitative conduite auprès des habitants par des spécialistes de ce grand ensemble d'habitat collectif qu'est la cité des 617-Logements ayant regroupé des populations relogées issues de diverses opérations de recasement de bidonvilles, cités de transit et autres immeubles menaçant ruine, «nous avons essayé de déconstruire et reconstruire le discours des enquêtés, par le repérage des mots qu'ils utilisent le plus souvent pour exprimer leur stigmatisation, mais également les significations qu'ils donnent à l'urbanité et à la citadinité en relation avec leur vécu actuel et leur passé résidentiel. Notre hypothèse de travail s'est articulée autour de l'idée qu'il fallait rechercher le principe de la construction de ces discours à l'intersection de deux logiques : la première résultant de la nécessité de construire un entre-soi protecteur par le renforcement des critères de reconnaissance et d'appartenance à des groupes homogènes et forts par le partage d'une même histoire et mémoire urbaine, la seconde découlant de la nécessité ressentie par les populations stigmatisées de produire un discours de retournement de la stigmatisation collective dont elles font l'objet ».