Projection - Un film documentaire réalisé par l'Egyptien Dawoud Hassan, racontant l'histoire des Amazighs d'Egypte a fait l'objet d'un débat, hier, lors d'une rencontre à l'espace Plasti. Produit par la Chaîne El Jazeera documentaire, le film, qui a pour titre ‘Les Amazighs de Siwa', revient sur l'histoire et le vécu des Amazighs égyptiens. Cette population, qui occupe aujourd'hui l'une des plus belles oasis du monde, Siwa, (située à la frontière libyenne) a longtemps été ignorée. Vivant en terre lointaine, coupée du monde, elle n'a été révélée que depuis peu. «Cette population a toujours existé en Egypte, sous l'appellation Siwie», raconte Dawoud Hassen, et d'abonder : «Cette population ne se doutait même pas qu'elle faisait partie des Amazighs du Grand Maghreb. Ce n'est que dans les années 90, lors de la visite de l'ambassadeur algérien dans cette région, et en s'adressant à eux en langue amazighe, chose inattendue, que les Siwis ont pris conscience de leur appartenance à cette culture et à l'histoire des Amazighs. Plus tard, la presse reprend la rencontre et voilà que je tombe sur cet article qui me donne le déclic pour faire des recherches et ce film par la suite.» Le film précise bien que la population amazighe de Siwa n'a rien à voir avec la dynastie qui a régné en Egypte pendant deux siècles, au temps des pharaons. C'est plutôt une tribu, «Chawiya», musulmane qui, fuyant la sécheresse, décide de chercher une terre plus clémente. Et à cette époque, Siwa constituait un lieu de transit pour les pèlerins du Nord africain vers La Mecque. Ne lui connaissant aucun habitant, la tribu décide de s'y installer et de s'approprier les lieux. Plus tard les bédouins les rejoignent, suivis des Arabes et depuis, les trois populations y vivent et constituent une société unie, adoptant la religion musulmane et parlant tamazight. Le documentaire rapporte aussi que les Siwis, bien qu'absents de l'activité politique depuis des siècles, jouissaient d'un système indépendant, gérant la vie sociale et juridique de la population. Ils furent intégrés au système politique au début du XXe siècle, vers la fin de l'Empire ottoman, durant le règne de Hilmi Bacha. La récupération n'était que pour des raisons économiques, l'empire en ruine cherchant alors des sources de financement pour maintenir son régime en danger de disparition, par la collecte des impôts des agriculteurs. Tout au long de leur histoire, ces Amazighs n'ont jamais été en confrontation avec le système politique en place. Ils ont toujours été considérés comme une partie du peuple égyptien, et tout comme leurs concitoyens ils ont subi les injustices du système politique en place. «Le retard du développement est dû à la négligence des autorités, mais il n'est pas prémédité. Comme la majorité de tout le peuple égyptien, les Siwis ont souffert de cette injustice», indiquera Dawoud Hassen, avant de souligner qu'«il faut préciser que, de nos jours, il y a un réel développement de la région et il n'y a pas de chômeurs grâce aux investissements touristiques que connaît l'oasis». - Le film consacre une bonne partie aux us et coutumes des Siwis, quant aux fêtes de mariages, aux vêtements et au rôle de la femme dans la perpétuation de la culture amazighe. A cet effet, cheikh Omar Radjeh, chef de la tribu Awled Moussa, présent à cette rencontre, avec l'habit traditionnel de la zawiya de snoussiya, dira : «C'est grâce aux travaux manuels des femmes tels que la broderie que nous avons pu préserver la calligraphie tifinaghe. Tamazight est la langue parlée par toute la population, transmise de génération en génération grâce à la famille. L'arabe et l'anglais sont appris à l'école.». Cheikh Omar Radjeh précise : «Nous sommes en contact avec nos frères amazighs du Maghreb pour sauvegarder notre langue, les jeunes lui ont fait perdre son authenticité avec un mélange d'arabe et d'anglais.» Le film nous fait visiter l'oasis Siwa, qui a gardé tous ses charmes et sa beauté. Par ses paysages féeriques, nous comprendrons comment les quelque 40 Chawis de l'Afrique du Nord ont été subjugués par l'oasis et l'ont aussitôt choisie en s'y établissant, voilà plus de 1000 ans. Notons que la délégation égyptienne des Amazighs de l'oasis de Siwa (Egypte) prend part au Festival du film amazigh de Tizi Ouzou, et le film ‘Les Amazighs de Siwa' est en compétition pour l'Olivier d'Or. Produit en 2008 en langue arabe, il s'agit du premier film traduit en dialecte siwa et n'a pu être projeté et médiatisé qu'en 2011, après la chute du régime Moubarak.