Protestation - La grève, considérée illégale par le ministre du Commerce et la coordination des boulangers, a été différemment suivie. Le mot d'ordre de grève lancé pour aujourd'hui par une aile de la corporation des boulangers, a cependant eu un impact réel sur la vie quotidienne des Algérois, voire de tous les citadins habitant les grandes villes du pays, au vu des habitudes alimentaires ancestrales. Ils étaient en effet nombreux ce matin à la recherche de la galette communément appelée «tadjine», «matlou'» ou «kesra», disponible partout. Aussi bien chez l'épicier du coin ou chez le laitier du quartier, c'était la ruée. Déjà, dans l'après-midi d'hier, les boulangeries de la capitale ont été prises d'assaut. «C'est du n'importe quoi. Cette grève, une de plus, qui va à l'encontre des intérêts du citoyen dont le pouvoir d'achat se détériore de jour en jour», nous disent plusieurs citoyens accostés hier et ce matin au niveau de plusieurs artères de la capitale. Une petite virée auprès des grévistes et non-grévistes, dénote de l'anarchie qui règne dans les rangs de la corporation, même si au niveau de la wilaya de Tizi Ouzou, notre correspondante nous signale que le mouvement de grève a été suivi à 100 %. Beaucoup d'entre eux, disent en effet avoir suivi ce mouvement par «principe» à l'appel de leur syndicat. D'autres, à l'image de certains à Alger -Centre, ont travaillé normalement et disent que «c'est une grève initiée par des manipulateurs à la solde d'un clan au sein de l'UGCCA». Si la question de la grève des boulangers divise aujourd'hui les protagonistes, le prix de revient de la baguette de pain qui doit être revu à la hausse fait l'unanimité. Le coordinateur régional de l'Union des boulangers, Abdelaziz Bouguerne, nous a précisé ce matin que «la grève est illégale. Ce sont des personnes qui ont été exclues des rangs de l'UGCAA, qui font tout pour semer la zizanie». M. Bouguerne qui avait appelé les boulangers à ignorer cet appel, nous dit en outre que «l'Union des boulangers est en contact permanent avec le ministère du Commerce et attend les résultats de la commission chargée de l'évaluation du coût réel du pain». Cette commission «rendra ses conclusions sur cette question dans 10 jours», nous a-t-il déclaré, précisant que le prix de la baguette pourrait atteindre les 12 DA. «Pourquoi donc faire grève ?», s'est interrogé notre interlocuteur. Pour cela, il a rappelé les conclusions faites le 4 avril dernier par une autre commission mixte, composée de représentants des ministères du Commerce, des Finances et de l'Agriculture, des représentants des boulangers, de l'Office interprofessionnel algérien des céréales (OAIC), du groupe industriel Eriad. Selon cette commission, le coût réel de la baguette oscille entre 9,5 et 10,5 DA selon la qualité des produits utilisés. Par ailleurs, le coordinateur régional de l'Union des boulangers a renseigné sur une partie des négociations entamées avec le ministère du Commerce faisant part des propositions faites pour baisser le prix de la farine à 1 500 DA le quintal et d'annuler la Taxe sur la valeur ajoutée (TVA) pour les produits utilisés dans la fabrication du pain. Mustapha Benbada «La grève est illégale» Lors d'une visite de travail effectuée hier matin dans la wilaya de Tizi Ouzou, Mustapha Benbada, ministre du Commerce, a indiqué que la commission neutre va rendre ses résultats demain, mercredi, concernant la revendication des boulangers, à savoir arrêter le juste prix de revient d'une baguette de pain. «Nous avons installé une commission neutre composée notamment du Comité interprofessionnel des céréales (CIC) qui va étudier la question, et les résultats seront connus ce mercredi», dira le ministre qui a été sollicité à ce sujet. L'installation de cette même commission est contestée par le président de la Fédération des boulangers, sous le motif que les membres de cette commission «ne sont pas du métier». Le ministre a précisé encore une fois que la décision d'arrêter un prix pour la baguette n'est pas des prérogatives de son département. «Ce n'est pas à nous de décider, c'est l'affaire du gouvernement». M. Benbada est allé jusqu'à remettre en cause l'appel à la grève lancé par les boulangers. «Ce que je peux dire, c'est que la Fédération des boulangers n'a pas appelé à la grève, mais s'il y a des boulangers qui ont décidé d'une grève, qu'ils assument».