Rencontre - Le parcours de Ferhat Abbas (1899-1985), le fondateur de l'Union démocratique du manifeste algérien (UDMA/1946-1956), a été évoqué lundi à Oran lors d'une conférence animée par l'historienne Malika Rahal de l'Institut d'histoire du temps présent (IHTP/ France). La rencontre s'est tenue au Centre national de recherche en anthropologie sociale et culturelle (CRASC), sous le thème "Ecrire sur l'UDMA, retour sur une expérience de l'histoire du temps présent". La séance intervient dans le cadre de la présentation du nouvel ouvrage de l'historienne, paru cette année en Algérie aux éditions Barzakh sous le titre "L'UDMA et les Udmistes. Contribution à l'histoire du nationalisme algérien". Le parcours et les activités mobilisatrices du parti de Ferhat Abbas occupent une large place dans cet ouvrage, fruit de quinze années de recherche auprès de différentes sources documentaires en Algérie et en France. Il est également basé sur des entretiens avec d'anciens membres de l'UDMA, a indiqué l'auteur dont le travail s'appuie aussi sur sa propre thèse de doctorat encadrée en 2003 par l'historien Benjamin Stora. Malika Rahal s'est ainsi attelée à mettre en lumière les revendications nationalistes portées par l'UDMA jusqu'à sa dissolution après dix années d'activisme, avant de rejoindre les rangs du Front de libération nationale (FLN) en 1956. Dans son ouvrage, l'historienne relève encore l'usage qui est fait aujourd'hui du parcours de Ferhat Abbas comme "outil de critique de l'évolution de l'histoire de l'Algérie indépendante". Elle a estimé à cet égard que "la nostalgie chez certains milieux français qui pensent que l'Algérie aurait pu connaître un meilleur avenir sous la présidence de Ferhat Abbas", est "un fait qui relève plus du fantasme que de la réalité". "Rêver que ça aurait pu être autrement revient à se fermer les yeux sur la dureté du rapport de force exercé par les forces coloniales qui n'ont pas hésité à réclamer la tête de Ferhat Abbas", a-t-elle rappelé. "Le fantasme d'une Algérie autre c'est aussi faire passe sur les stratagèmes de la France coloniale, dont le trucage du système électoral à l'époque où Ferhat Abbas pensait offrir au peuple algérien l'indépendance une fois son parti élu à l'Assemblée constituante", a souligné Malika Rahal. Et l'historienne d'expliquer que "si Ferhat Abbas n'a pas été président, c'est parce qu'il fallait une guerre pour recouvrer l'indépendance, et que toute son expérience partisane était perdue, vaincue par davantage de militarisme". De son côté, l'historien et chercheur au CRASC Saddek Benkada a qualifié d'excellent le travail de Malika Rahal, en ce sens qu'il constitue, a-t-il dit, un apport important à l'historiographie algérienne dont peuvent profiter les générations présentes. Un atelier méthodologique sera animé mardi au CRASC par l'historienne qui a, à son actif, une biographie d'Ali Boumendjel (1919-1957), avocat membre de l'UDMA assassiné par les forces coloniales. Des rencontres similaires sont prévues par Malika Rahal durant le mois en cours au Centre d'études maghrébines (CEMA) d'Oran, à l'Université de Tlemcen, à Alger puis à Sétif.