Qualités Doté d?un sens de l?observation pointu et d?une grande sensibilité, Dinet, qui nourrissait un véritable souci de véracité et du détail, a su brosser une fresque de la vie saharienne. Il est essentiel de rappeler, voire de préciser que l?art de Dinet n?adhère nullement à une vision orientaliste, écartant ainsi toute sorte d?équivoque ; c?est une expression réaliste, figurative, même si cela donne cependant la nette impression qu?il s?agit d?un discours exotique porté sur le musulman ? l?Algérien. La peinture de Dinet, qui se veut instantanée, pleine de dévouement, de clairvoyance et de conscience, suivant un cheminement raisonné, est d?une grande et rare beauté ; contrairement aux peintures exécutées par des orientalistes, amoureux de cet Orient envoûtant, une interprétation individualiste et merveilleuse de ce dernier, Dinet ne cherche ni le rare, ni l?étrange, ni l?extraordinaire ni le pittoresque, il conçoit seulement une peinture du dévoilement, et du «dit». Une peinture figurative, revêtant un réalisme saisissant, prenant, et à travers laquelle le regard, attentif à ce qui se présente à lui, reproduit les aspects pluriels de la vie algérienne, notamment celle du Sud, en faisant ressortir ses légendes et ses traditions, relever les conditions de vie souvent sévères dans lesquelles vivait la population «indigène», mais aussi la joie de vivre, l?innocence, la sensualité, la spiritualité, et bien d?autres caractéristiques venant définir celle-ci et l?identifier. Effectivement, Dinet, et afin de donner à ses peintures toute leur teneur et leur portée, explore l?imaginaire, les légendes et les récits, les croyances et les cultures des sociétés sahariennes, et cela en perfectionnant ses connaissances en langue arabe. Dinet se veut un témoin d?une peinture à l?autre, d?une différence, en la mettant bien en évidence, faisant ainsi ressortir toutes ses spécificités. Il désigne, montre, nomme, explique? Doté d?un sens de l?observation pointu, et d?une grande sensibilité, saine et authentique, Dinet, qui nourrissait un véritable souci d?exactitude et de véracité et aussi du détail, a su brosser une fresque de la vie saharienne, sans pour autant tomber dans la démesure, l?emphase et le fantasmatique, même si une partie de sa production picturale revêt un caractère érotique. L?érotisme existe certes, mais il n?est pas illustré de la même manière que ses contemporains orientalistes qui voient dans l?Orient qu?un accomplissement du «moi fantasmatique», cette libido refoulée en soi et qui se manifeste à travers la représentation de ce monde mythique. Si l?aspect spirituel que Dinet découvre dans les régions sahariennes de l?Algérie le fascine, la sensualité et la volupté que recèlent, loin des regards indiscrets, au bord de l?oued ou sous une cascade, ou au pied d?un palmier, ou encore sous le clair de lune, ces contrées africaines mais tendant vers l?Orient agissent sur lui, exacerbant ses sens. Des peintures comme Filles essorant leur linge, Baigneuses dans l?oued, le massage, La lutte des baigneuses, Au bord de l?oued, le bain sous la cascade, où Dinet évoque d?une manière prodigieuse et avec un talent certain et dans un réalisme tout à fait étonnant des scènes d?intimité surprenantes. Il y illustre avec un souci du détail et de la précision le nu, «une sensualité innocente et sans interdit» par laquelle se caractérisent les jeunes filles de Bou-Saâda. L?érotisme apparaît également lorsque Dinet peint des scènes de danse des filles des Ouleds Naïl, une danse suggestive, lascive, qui dit et qui sollicite. C?est-à-dire une danse signifiant ou mimant l?acte d?amour dans des gestualités spécifiques. L?érotisme occupe en effet une grande place, voire une place particulière dans la peinture de Dinet, sauf que, contrairement aux autres orientalistes, sa peinture n?est pas l?accomplissement du moi fantasmatique, mais plutôt la reproduction de la réalité.