Yennayer est donc le jour de l?an, le premier jour du calendrier encore employé dans les campagnes algériennes. On prononce aussi, selon les régions : nnayer, innayer, innar... Mais d'où provient cette dénomination, pour le moins étrange ? On lui a donné une origine berbère et certains ont tenté de l?expliquer par cette langue en la lisant yen-yar, autrement dit : yen/yiwen et yur/ayur : «un de la lune», c'est-à-dire le premier jour du mois (lunaire). Seulement, le calendrier agraire n'est pas un calendrier lunaire, mais un calendrier solaire ! S'il est encore demeuré dans les campagnes algériennes et utilisé à la place du calendrier hégirien, du moins dans les travaux, c?est justement parce qu'il est plus adapté à ces travaux et au rythme des saisons. Le calendrier, hégirien, lunaire est, lui, réservé aux pratiques religieuses et à leurs cérémonies : début du ramadan, Aïd el-Fitr, Aïd el-Adha, Mouloud, Achoura, etc. Les Romains, auxquels nous avons emprunté le calendrier, ont utilisé d'abord un calendrier lunaire de 304 jours, puis de 355 jours. Comme il accusait encore du retard et que les fêtes faisaient le tour de l'année, Jules César lui a fait subir une autre réforme, en 45 avant J.-C. : le nouveau calendrier, devenu solaire, divise l'année en 365 jours un quart, quart que l'on compense en ajoutant tous les quatre ans un jour supplémentaire ; c'est le calendrier julien, que nous avons emprunté tel quel. En fait, Yennayer nous vient du latin, le calendrier auquel nous l?avons emprunté étant, ne l'oublions pas, romain ! Le mot n'est que la forme locale de januaris, ou pour utiliser la formule complète januaris mens, en latin, «le mois du dieu Janus», qui a donné en français janvier. D'ailleurs, tous les noms de mois du calendrier agraire viennent du latin.