Le métier, san?â, ce n?est pas seulement l?activité rémunérée, c?est aussi tout travail que l?on fait avec habileté, avec amour aussi. Ainsi, pour vanter les mérites d?une femme, surtout s?il s?agit d?une femme à marier, on dit : «Mkul sba?â b san?â» (à chaque doigt, un métier). Et on énumérait ces «métiers» qui étaient, en fait, des savoir-faire : ta?âraf tyab (elle sait cuisiner), ta?âraf lghssil (elle sait faire la lessive), ta?âraf lkhyat?a (elle sait coudre), ta?âraf lbrodi (elle sait broder)... jusqu?à énumérer dix activités ! D?ailleurs, les marieuses se plaisaient à interroger les filles sur ces «métiers». Certaines demandent toujours à voir les mains des jeunes filles. Si elles sont blanches, avec des ongles bien taillés et bien arrondis, cela signifie que la fille en question ne travaille pas de ses mains ; si, au contraire, les mains sont crevassées, avec des ongles abîmés, c?est signe qu?elle utilise ses mains ! Autrefois, à La Casbah, quelques jours après les noces, on mettait à l?épreuve la mariée, en lui demandant de préparer le repas de la fête ! «Mul san?â memluk», dit-on, (celui qui exerce un métier est comme envoûté). Cela signifie que le métier occupe tout le temps la personne, qu?il ne se sent bien qu?en l?exerçant et surtout, qu?il l?exerce avec passion ! En effet, la san?â, la h?irfa, c?est avant tout une affaire de passion : on ne fabrique pas seulement des poteries, des tapis ou des luths parce qu?on en a besoin pour vivre, mais aussi parce qu?on aime faire cela ! D?ailleurs beaucoup d?artisans mettent leur sceau, qui consiste en un petit symbole, une couleur ou tout autre signe, qu?ils portent sur les objets qu?ils fabriquent.