Pour les fans de foot, les jours se suivent et se ressemblent. Discussions, paris et chamailleries vont au gré d?une fin de saison haletante et le suspense n?a d?égal aujourd?hui qu?un enivrement sportif à la limite de l?hystérie. A Alger, pour ne citer que la ville qui dispose du plus grand nombre de pensionnaires de l?élite, tout le monde en parle. Avec passion et déchaînement. La «fin en apothéose» et la «descente aux enfers» agrémentent, par discussions et chamailleries interposées, un quotidien rythmé à la cadence d?un suspense insoutenable. Dans les bus, les cafés, au pied des immeubles, dans les quelques jardins verdoyants, devant les mosquées, à la sortie des écoles et lycées, le championnat est décortiqué de fond en comble, non sans cet inévitable chauvinisme. Un frère mouloudéen et un autre usmiste, une mère koubéenne et un père canari, l?espace d?un après-midi de foot troquent leur lien de parenté, pourtant sacré, contre un chauvinisme enivrant et plein de ferveur. La même ambiance est perceptible non loin des étals des buralistes où des jeunes et moins jeunes dévorent de leurs yeux des Unes pleines d?allant qui donnent, avant chaque journée de championnat, du ton à coup de manchettes suggestives. Entre groupes, les pronostics vont bon train. La tension va souvent crescendo. Les spéculations sont aussi sur toutes les lèvres. On entend à tout bout de champ que le Mouloudia va «offrir» le championnat à la JSK au mépris d?un ancestral bon voisinage avec l?USMA ou alors que les Usmistes vont emmener un gros cabas à Oran pour que le MCO fasse barrage à l?appétit gargantuesque des Canaris qui veulent faire aussi bien que leurs aînés du Jumbo-Jet. On entend aussi des louanges sans cesse scandées par quelques «ultras» du CRB qui prient pour que la «bête noire» nahdiste prenne immédiatement l?ascenseur vers un purgatoire où l?on a souvent du mal à refaire ses classes. Les «ennemis», les «amis», «les hommes», «les honnis»... jamais le vocabulaire de la Division une n?a été aussi riche que durant cette saison. Supporteurs de tout acabit s?en servent à satiété, quitte à s?attirer irrémédiablement les foudres d?une rivalité qui monte tout le temps d?un cran à l?heure des verdicts. Etre supporter, c?est se vêtir du maillot du club chéri. Aller au stade, crier à haute voix, s?adonner au jeu très passionnant des pronostics et être branchés, au fil des minutes, sur ce qui se passe avec le club rival. Dans un football national où très souvent ce n?est pas forcément le meilleur qui gagne, la fin prend en otage tout le monde. La frénésie est à son paroxysme. Le tomber de rideau sur le championnat devient alors le sujet de prédilection. On en discute du matin jusqu?au soir. On utilise même le téléphone portable et on perd quelques unités précieuses qui auraient servi à quelque chose de plus sérieux pour envoyer des SMS narquois, à la limite de la vulgarité? à l?adresse d?un ami qu?on prend, l?espace d?une journée de foot, pour un ennemi de longue date. Dans les cafés, on offre un café, une limonade ou un jus à celui qui vient plaider la cause d?un clan au détriment d?un autre. Quelques supporters, tous bords confondus, suivent d'un ?il inquiet l?évolution d?une fin de saison qui n?arrive toujours pas. Ils sont totalement incertains quant à l?avenir dubitatif face à un tunnel dont ils ne voient pas encore l?issue. Le match continue. On joue les prolongations...