La grande particularité du ramadan c'est que l'appel à la rupture du jeûne scinde carrément le jour en deux : une journée difficile avec l'ennui de faire toute une gymnastique pour remplir un couffin de légumes dont le prix frise souvent la déraison et une soirée qu'on espère de tout cœur interminable tant le temps qui nous est imparti est infiniment trop court pour répartir trois ou quatre heures entre deux ou trois hobbies qui vont s'étaler jusqu'au s'hour, avant d'aller dormir et attendre le jour d'après en regardant tout le temps la montre et en attendant la fatidique seconde où le muezzin viendra sauver les ventres creux et les têtes déboulonnées. L'autre particularité, c'est que ramadan donne à chaque quartier son identité tant la vie reprend de plus belle la nuit. A Bab El-Oued, El-Anka, Zahi et Guerrouabi ont toujours le gosier charmeur ; ils gardent leurs éternels fans éveillés jusqu'aux premières lueurs d'une aube qui peine à atténuer la fumée des feux de Bengale allumés quelques heures plus tôt pour un match USMA-MCA inopiné durant le ramadan. A Belouizdad, jeux de cartes, petits business sous l'imposante Laâkiba et grosses chamailleries autour du CRB qui perd et qui gagne, sont le lot de soirées qui se suivent et se ressemblent. La même ferveur est perceptible partout, certes avec quelques petits détails insignifiants qui font la différence. Une différence dont seul ramadan peut s'enorgueillir de posséder la magie.