Résumé de la 84e partie n La vieille dame s'approche du roi et lui parle des grands hommes de foi qui ont révolutionné toute une nation. Et, ayant dit ces paroles, la vieille ajouta : «J'eusse voulu, ô roi, te rapporter encore des traits admirables de la vie de nos anciens sages. Mais voici que la nuit approche, et d'ailleurs les jours d'Allah sont nombreux pour ses serviteurs !» Et la sainte vieille ramena son grand voile sur ses épaules et recula au milieu du groupe formé par les cinq adolescentes. Ici le vizir Dandân cessa un moment de parler au roi Daoul' makân et à sa sœur Nôzhatou qui était derrière le rideau. Mais, après quelques instants, il reprit : Lorsque ton défunt père, le roi Omar Al-Némân, eut entendu ces paroles édifiantes, il comprit que vraiment ces femmes étaient les plus parfaites de leur siècle, en même temps que les plus belles et les plus cultivées de corps et d'esprit. Et il ne sut quels égards leur témoigner qui fussent dignes d'elles, et il fut complètement sous le charme de leur beauté, et il les désira avec ardeur, en même temps qu'il fut plein de respect pour la sainte vieille, leur conductrice. Et en attendant, il leur donna pour y demeurer, l'appartement réservé qui avait appartenu jadis à la reine Abriza, reine de Kaïssaria. Et, durant dix jours de suite, il alla lui-même prendre de leurs nouvelles et voir par lui-même si rien ne leur manquait ; et chaque fois qu'il allait, il trouvait la vieille en prière, qui passait ses journées dans le jeûne et ses nuits dans la méditation. Et il fut tellement édifié de sa sainteté qu'un jour il me dit : «O mon vizir, quelle bénédiction que d'avoir dans mon palais une si admirable sainte ! Mon respect pour elle est devenu extrême et mon amour pour ces jeunes filles sans limites. Viens donc avec moi pour demander enfin à la vieille, puisque les dix jours de notre hospitalité sont passés et que nous pouvons parler affaires, quelle somme elle veut nous fixer comme prix de ces adolescentes.» Nous allâmes donc à l'appartement réservé et ton père demanda la chose à la vieille qui lui dit : «O roi, sache que le prix de ces jeunes filles consiste en des conditions qui sont en dehors des conditions ordinaires des ventes et des achats. Car leur prix ne se paie point en or ni en argent ni en pierreries.» A ces paroles, ton père fut extrêmement étonné et lui demanda : «O femme vénérable, en quoi consiste donc le prix de vente de ces jeunes filles ?» Elle répondit : «Je ne puis te les vendre qu'à cette seule condition : un jeûne d'un mois entier que tu ferais en passant tes journées dans la méditation et tes nuits dans la veille et la prière. Et au bout de ce mois de jeûne complet, par lequel ton corps serait purifié et deviendrait digne de communiquer avec le corps de ces jeunes filles, tu pourrais jouir totalement de leurs douceurs.» Alors ton père fut édifié à la limite de l'édification et son respect pour la vieille ne connut plus de bornes. Et il se hâta d'accepter ses conditions. Et la vieille lui dit : «De mon côté, je t'aiderai par mes prières et mes vœux à supporter le jeûne. Maintenant apporte-moi un broc de cuivre.» Alors le roi ton père lui donna un broc de cuivre qu'elle remplit d'eau pure et elle abaissa ses regards sur le broc et se mit à dire dessus des prières en une langue inconnue et à marmotter pendant une heure des paroles auxquelles nul de nous ne comprit un mot. (à suivre...)