Résumé de la 84e partie n Quand les jeunes filles ont terminé, c'est au tour de la vieille dame d'évoquer les histoires des grands hommes de foi. Une manière de faire parvenir le message au jeune nouveau roi. Et, ayant dit ces paroles, la cinquième jeune fille recula au milieu de ses compagnes. Alors seulement, d'un pas grave, s'avança la sainte vieille femme. Elle baisa neuf fois la terre entre les mains de ton défunt père, le roi Omar Al-Némân, et dit. Paroles de la vieille. «Tu viens, ô roi, d'entendre les paroles édifiantes de ces jeunes filles sur le mépris des choses d'ici-bas, dans la mesure où ces choses doivent être méprisées. Moi, je te parlerai de ce que je sais concernant les faits et gestes des plus grands d'entre nos anciens. «Il est raconté que le grand imam Al-Schâfi (qu'Allah l'ait en ses bonnes grâces !) divisait la nuit en trois parties : la première pour l'étude, la seconde pour le sommeil et la troisième pour la prière. Et, vers la fin de sa vie, il veillait toute la nuit, ne réservant plus rien pour le sommeil. «Le même imam Al-Schâfi (qu'Allah l'ait en ses bonnes grâces !) a dit : «Durant dix ans de ma vie, je n'ai point voulu manger à ma faim de mon pain d'orge. Car trop manger est nuisible de toutes les manières. Cela épaissit le cerveau, endurcit le cœur, annihile les facultés intellectuelles, attire le sommeil et la paresse et enlève jusqu'à la dernière énergie.» «Le jeune Ibn-Fouâd nous raconte : «J'étais un jour à Bagdad, au moment où l'imam Al-Schâfi y séjournait. Et j'étais allé sur la rive du fleuve pour faire mes ablutions. Or, pendant que j'étais accroupi à faire mes ablutions, un homme, suivi d'une foule silencieuse, passa derrière moi et me dit : «O jeune homme, soigne bien tes ablutions et Allah te soignera !» Et je me retournai et je vis cet homme qui avait une grande barbe et un visage sur lequel était empreinte la bénédiction ; et aussitôt je me hâtai de terminer mes ablutions et je me levai et le suivis. Alors il me vit et se tourna vers moi et me dit : «As-tu besoin de me demander quelque chose ?» Je lui dis : «Oui, ô vénérable père ! Je désire que tu m'apprennes ce que certainement tu tiens d'Allah le Très-Haut !» Et il me dit : «Apprends à te connaître ! Et alors seulement agis ! Et alors seulement agis selon tous tes désirs, mais en prenant garde de ne pas léser ton voisin !» Et il continua son chemin. Alors je demandai à l'un de ceux qui le suivaient : «Qui donc est-il ?» Il me répondit : «C'est l'imam Mohammad ben-Edris Al-Schâfi !» A ce moment de sa narration, Schahrazade vit apparaître le matin et, discrète selon son habitude, se tut. Le soir venu, elle dit : Il m'est parvenu, ô Roi fortuné, que la sainte vieille continua de la sorte : «On raconte que le khalife Abou-Giafar Al-Mansour voulut nommer kâdi Abi-Hanifa et lui allouer dix mille drachmes par an. Mais lorsque Abi-Hanifa eut appris l'intention du khalife, il fit la prière du matin, puis s'enveloppa de sa robe blanche et s'assit sans dire un mot. Alors entra l'envoyé du khalife pour lui remettre d'avance les dix mille drachmes et lui annoncer sa nomination. Mais, à tout le discours de l'envoyé, Abi-Hanifa ne répondit pas un mot. Alors l'envoyé lui dit : «Sois pourtant bien sûr que tout cet argent que je t'apporte est chose licite et admise par le Livre.» Alors Abi-Hanifa lui dit : «Cet argent est chose licite, en vérité, mais Abi-Hanifa ne sera jamais le serviteur des tyrans !» (à suivre...)