Résumé de la 37e partie n Quand on laisse enfin les passagers des classes inférieures accéder aux chaloupes, c'est la débandade : il ne reste presque plus d'embarcations. Tandis qu'on crie et qu'on s'entredéchire, l'orchestre de Wallace Hartley continue à jouer. Enfin, il ne reste plus que la moitié de l'orchestre, des musiciens ayant préféré tenter leur chance. Cependant, la proue du «Titanic» ayant commencé à s'enfoncer, le bateau se soulève : il est de plus en plus difficile de garder son équilibre. Hartley s'arrête brusquement de jouer. «Mes amis, dit-il aux musiciens, je crois que personne ne nous écoute plus. Je crois qu'il est également temps de vous libérer pour vous permettre d'embarquer.» Il s'approche des hommes et leur serre chaleureusement la main. «Vous avez été formidables ! — C'était un honneur de jouer dans votre orchestre !» Les musiciens s'éloignent en direction des embarcations. Hartley, lui, a repris son violon et s'est remis à jouer : il ne s'est arrêté que pour laisser partir les hommes. Cependant, en entendant la musique, ceux-ci se sont arrêtés. Ils se consultent du regard et retournent auprès de Hartley : ils ont choisi, eux aussi, de rester... Agé de 33 ans au moment du naufrage, Wallace Hartley a l'habitude de travailler sur les bateaux. Il a fait ainsi 70 voyages qui l'ont mené à travers le monde. Fiancé depuis peu, il avait d'abord pensé refuser la proposition de la Star White de faire le voyage sur le «Titanic», mais il a réfléchi et il s'est dit qu'un tel voyage, sur le plus grand bateau du monde, ne pouvait que lui faire de la publicité. Il était jeune et il avait, pensait-il, une longue carrière devant lui. Pendant le sauvetage des passagers et la panique qui s'en est suivie, Hartley a joué Les Contes d'Hoffmann. Mais selon les survivants, le dernier morceau interprété, au moment où le bateau allait sombrer, est un hymne religieux, Le Plus près de toi, mon Dieu. Harley appartenait à l'Eglise méthodiste et il était un fervent pratiquant. Un jour, alors qu'il discutait avec des amis, il avait dit : «Si je fais naufrage, le dernier morceau que je jouerai est le O God, our help in Agest Past.» La presse a salué son courage et l'a qualifié de héros. Quant à sa ville natale, Colne, elle lui a érigé un buste et plusieurs milliers de personnes ont assisté à la cérémonie organisée à sa mémoire. Le colonel Archibald regarde sa montre : il est 01h 55 et la dernière embarcation va être mise à l'eau : mais il ne songe toujours pas à embarquer. Il y a tant de femmes et d'enfants à prendre encore. Pourtant, il sait que des hommes sont partis. Il a même vu Bruce Ismay, le directeur général du «Titanic», prendre place dans un canot. Il a laissé son secrétaire et son majordome, ne pensant qu'à sauver sa peau. Selon le récit des survivants, il s'est couvert la tête d'une sorte de fichu pour qu'on ne le reconnaisse pas. Les dernières embarcations s'éloignent. Les rescapés, épouvantés, jettent un dernier coup d'œil sur le «Titanic». Ses hublots allumés, les passagers allant et venant, les cris, la musique : tout lui donne un air de fête... «Mon Dieu, soupire une femme, un si beau bateau... — Et dire qu'on le croyait insubmersible !» (à suivre...)