Spectacle n Le troubadour de la chanson kabyle a émerveillé, avant-hier soir, son public à la radio nationale. Venus nombreux, ses fans ont ainsi (ré) écouté celui qui a bercé leurs vies durant quarante ans. Accompagné de son fils Djaâfar et de son orchestre composé de deux musiciens, celui que Kateb Yacine a qualifié du plus grand poète actuel, a déclenché une véritable explosion de joie et d'émotion chez le public. Il n'a laissé, durant plus de deux heures, personne indifférent, ni les jeunes, ni les familles, ni la gent féminine venue d'ailleurs en force. La foule se lève, sur un fond d'applaudissements pour l'acclamer à l'unisson. L'auteur de l'immortelle Ammi souhaite la bienvenue à tous, oubliant presque que c'est lui l'invité de toute cette soirée. Ainsi, l'homme aux moustaches à la turque inaugure cette soirée par sa célèbre Dhachou Ichfigh (Ce dont je me souviens), suivie de Adjthiyi Nek Dherayiou (Laissez-moi avec mon raisonnement). Deux textes écrits depuis plus de 20 ans. L'assistance a inlassablement applaudi, remarquablement dansé. «Les années d'or» ont été inaugurées par la célèbre Fi Yessmim Aziz Youzel Leklem, suivie de Combien de fois je parle de toi et surtout Ne me laisse pas. Trois titres spécialement d'amour, durant lesquels tout le public a observé un silence religieux. L'assistance était, en effet transportée à son corps défendant dans un autre monde, celui des rêves et des souvenirs mêlés. 22 heures passées, le ciseleur du verbe aborde d'autres thématiques. Da Lounis, avec sa voix envoûtante et profonde, a chanté Anedjmaâ (la réunion des villageois) et Nous, les enfants de l'Algérie, par lesquelles il met en avant son style philosophique. Le troubadour, enchaînera, par Yennad Umghar (Le sage a dit), un extrait de son dernier album, où il a fait remarquer que la sagesse qu'il chante dans ses chansons n'est puisée que chez les petites gens qu'il côtoie. Ouardia, une quinquagénaire, venue d'Alger-Centre, nous a déclaré que Lounis qui a procuré beaucoup de joie à sa génération, les avait fait pleurer lorsqu'ils étaient jeunes, notamment avec ses chansons d'amour. Et pour boucler la boucle, l'enfant prodige d'Ighil Bouammas, a clos le spectacle par le titre La JSK, une chanson qui demeure parmi les meilleures dédiées au prestigieux club kabyle, interprétée durant les années 1970, et ce sous les applaudissements chaleureux de son public. «Les reprises de chansons tuent la créativité» InfoSoir : votre public est sur sa faim, y aura-t-il un nouveau-né à l'horizon ? Aït Menguellet : Il n'y a pas de nouveau et je ne sais pas quand il y en aura. J'ai toujours travaillé comme ça. J'attends que ça vienne (l'inspiration). Pour l'instant ce n'est pas encore venu. Dès qu'il y aura quelque chose, ça me fera plaisir de le présenter à mon public Pouvez-vous nous parler amplement du projet de traduction de votre œuvre en langue arabe ? Effectivement, il y a une traduction qu'on prépare et qui va paraître bientôt. Cependant, on n'a pas de date exacte, mais la sortie du livre, sera peut-être vers le début février. La traduction concernera toutes les œuvres en arabe. C'est moi qui ai accepté et chapeauté les traductions de Sadouni Belkacem. Celui-ci, paraît-il a fait d'excellentes traductions. Vous avez chanté l'amour puis des chansons à caractère social et politique avant de les couronner par celles pleines de sagesse. Quel est le secret dans cet ordre chronologique ? Il n'y a aucun secret. Je pense avoir été logique avec le temps, mon âge et mes différentes étapes de vie, j'ai laissé le temps faire son œuvre. Quel regard portez-vous sur la chanson kabyle actuellement ? Il y a des gens qui ont des chansons à texte, d'autres des chansons d'ambiance. Il faut un peu de tout, une chanson ne peut être riche en donnant un seul genre de chanson, et il faut que tous les genres coexistent en bonne intelligence. Je pense que la chanson se porte bien dans un sens. Il y a des jeunes qui sont en train d'émerger et de produire de très bonnes choses. Personnellement, je suis très content. En revanche, les reprises font beaucoup de tort à notre chanson, puisqu'elles freinent la création et les tuent. Ceux qui n'ont pas de chansons, et qui ont une belle voix peuvent s'adresser à des auteurs, qui écrivent et qui cherchent à donner leurs textes. Il y a aussi des musiciens qui composent de la musique. Et là une association chanteurs-auteurs-compositeurs est la bienvenue. De cette manière chacun trouvera son compte, et la créativité y gagnera.