Mesure n Les autorités ont décidé d'accompagner l'entrée en vigueur de la nouvelle grille des salaires d'une mesure pour le moins inique : reverser des contingents entiers de vacataires dans le régime des fonctionnaires payés à l'heure. Avril 2008. Après de longs mois d'attente, la nouvelle grille des salaires de la Fonction publique entre en vigueur. Une bouée de sauvetage pour des centaines de milliers de fonctionnaires, au milieu d'une tempête sociale marquée par une inflation débridée touchant notamment les produits de première nécessité. D'autant plus que les augmentations sont assez conséquentes, entre 3 000 et 15 000 DA. Sauf que la joie qui a suivi l'annonce officielle de la revue à la hausse des rémunérations, n'a pas visité tous les foyers. Non seulement l'écrasante majorité des vacataires n'a pas été touchée par la mesure, mais elle a vu carrément ses salaires revus à la baisse. C'est la douche froide. «J'ai failli piquer une dépression. Ma déception était telle que je n'ai pas travaillé pendant plusieurs jours. Je suis restée cloîtrée chez moi à pleurer…», témoigne Farida, secrétaire dans une APC de la banlieue est de la capitale. Mère de famille, elle travaille en tant que vacataire depuis 10 ans, dans le même service. Tous ses espoirs se sont évanouis en cette fatidique journée printanière où elle a vu son salaire réduit d'un tiers. De 12 000 à 8 000 DA. «Si je n'avais pas la fiche de paie entre les mains, j'aurais cru à un poisson d'avril…», ajoute-t-elle. Rien qu'à Reghaïa, ils sont quelque 300 vacataires à vivre la même situation. La plupart d'entre eux comptent entre 5 et 10 ans d'ancienneté. Rencontrés sur leur lieu de travail, ils n'en reviennent pas. Ils sont unanimes à affirmer qu'ils étaient à mille lieues de s'imaginer un tel sort. F. A., agent de bureau, affirme que son salaire est passé de 16 000 à 11 000 DA. Exhibant les fiches de paie des mois de mars et d'avril, il affirme ne plus savoir quoi faire pour subvenir aux besoins de sa femme et de ses deux enfants. «Déjà à 16 000 DA, je trouvais toutes les peines du monde à boucler les fins de mois. A 11 000 DA, soit 1 000 DA de moins que le Snmg, cela va être l'enfer pour ma famille et moi. C'est inacceptable ce qui nous arrive», peste-t-il. Le malheureux père de famille raconte qu'il avait placé tous ses espoirs sur la nouvelle grille des salaires. Les détails, publiés par la presse sur les montants des augmentations prévues pour chaque catégorie de fonctionnaires, lui ont fait penser qu'il atteindrait un salaire de 21 000 ou 22 000 DA. De quoi mettre un peu de beurre dans les épinards d'autant que sa vie est une succession de privations depuis dix ans, date à laquelle il été recruté en qualité de vacataire. La même déception se lit sur le visage de nombreux autres fonctionnaires. Parmi eux, des ingénieurs et des architectes qui devront désormais se contenter d'un salaire oscillant entre 8 000 et 11 000 DA. Une situation qu'ils n'arrivent pas à admettre et qu'ils n'hésitent pas à qualifier de hogra. D'autant, signalent-ils, que des employés sans aucune qualification, exerçant notamment comme agents de sécurité, sont nettement mieux rétribués, par le simple fait qu'ils soient titulaires ou contractuels et non vacataires. Toute la différence est là, en effet. Pour des raisons faciles à deviner, les autorités ont décidé d'accompagner l'entrée en vigueur de la nouvelle grille des salaires d'une mesure pour le moins inique : reverser des contingents entiers de vacataires dans le régime des fonctionnaires payés à l'heure. Ainsi, des huit heures de travail quotidiennes qu'ils effectuaient auparavant, ils sont contraints désormais de ne servir, pour la plupart d'entre eux, que pendant 5 heures. Etant payés à l'heure, cette réduction du volume horaire s'est naturellement répercutée sur leur rémunération.